Le projet de TGV Québec-Toronto ira de l’avant

Mercredi, Justin Trudeau a parlé d’une «annonce historique» et décrit le TGV comme le projet d’infrastructure le plus important de l’histoire canadienne.
Photo: Christinne Muschi La Presse canadienne Mercredi, Justin Trudeau a parlé d’une «annonce historique» et décrit le TGV comme le projet d’infrastructure le plus important de l’histoire canadienne.

À quelques semaines de son départ, le premier ministre Justin Trudeau a annoncé mercredi le démarrage du projet de train à grande vitesse (TGV) entre Québec et Toronto. Un contrat sera bientôt signé avec le consortium Cadence, qui aura pour mandat de concrétiser ce service ferroviaire baptisé Alto.

S’il se réalise, le réseau s’étendra sur près de 1000 km, et les trains électriques pourront rouler jusqu’à 300 km/h sur des voies réservées, avec des arrêts à Toronto, à Peterborough, à Ottawa, à Montréal, à Laval, à Trois-Rivières et à Québec.

Le premier ministre fédéral a parlé d’une « annonce historique » et décrit le TGV comme le projet d’infrastructure le plus important de l’histoire canadienne. « C’est un projet nécessaire pour notre économie et nos citoyens », a-t-il dit.

Le TGV réduira de moitié le temps pour faire la liaison entre Toronto et Montréal, l’amenant à trois heures, a soutenu Justin Trudeau.

Coût total et échéancier encore flous

Le contrat avec le consortium Cadence sera signé au cours des prochaines semaines. Ce consortium, qui réunit notamment CDPQ Infra, AtkinsRéalis, Keolis, Systra, SNCF Voyageurs et Air Canada, se verra confier les phases de conception et de construction du projet, en plus de celles du financement, de l’exploitation et de l’entretien du réseau.

Ottawa prévoit un montant de 3,9 milliards de dollars sur six ans pour la phase de conception, qui permettra de déterminer les tracés et la localisation des stations et de réaliser les études et les consultations avec les communautés autochtones.

Il s’agit donc d’un partenariat public-privé, mais les actifs demeureront la propriété du gouvernement canadien, a assuré Martin Imbleau, président-directeur général pour le projet Alto.

Le premier ministre n’a pas voulu s’avancer sur le coût total du projet. Une somme d’au moins 100 milliards de dollars avait été évoquée dans le passé.

Questionné sur le lancement d’un projet d’une telle envergure dans un contexte de déficit, Justin Trudeau a affirmé que le Canada avait le plus faible déficit du G7. « Les investissements dans un TGV vont non seulement permettre une croissance économique importante avec des milliers d’emplois et des milliers d’opportunités pour les entreprises à travers le pays […], mais ça va augmenter la productivité de façon fondamentale. »

Quant à l’échéancier, il n’a pas été précisé, si ce n’est le développement, qui prendra quatre à cinq ans. « On va prendre notre temps pour bien développer le projet, sur 1000 kilomètres et plusieurs phases. Dans quatre ou cinq ans, on saura on construit quoi, où et combien en détail. Avant ça, ça serait prématuré d’avoir des échéanciers définitifs », a expliqué Martin Imbleau.

Un « momentum » difficile à annuler

Cette annonce survient à deux semaines de la désignation d’un nouveau chef à la tête du Parti libéral du Canada. À l’approche d’élections fédérales qui devraient avoir lieu ce printemps, le projet survivra-t-il en cas de changement de gouvernement ?

« On va signer un contrat dans les jours et les semaines à venir qui va [déterminer] le travail qui va se faire dans les cinq prochaines années », a avancé Justin Trudeau, en évoquant « un momentum qui sera très difficile pour tout autre gouvernement d’annuler ».

Concernant la fiabilité du futur réseau, alors que le Réseau express métropolitain fait face à de multiples pannes ces jours-ci, le premier ministre a rappelé l’importance de la phase de planification et de développement du projet pour s’assurer de choisir la technologie adaptée.

Justin Trudeau n’a pas voulu s’avancer sur les exigences qui seront imposées quant au contenu canadien dans le projet. Le Canada est un grand producteur d’acier, d’aluminium et de cuivre, et le projet vise à stimuler l’activité économique au pays, a-t-il rappelé. « Tout ça va faire partie des réflexions pour avoir le meilleur projet au meilleur prix avec les meilleurs impacts économiques pour le Canada. »

Pour l’instant, on ignore quel sera le tracé précis du futur réseau et si, dans la région métropolitaine, les trains pourront se rendre au centre-ville de Montréal ou à l’aéroport Montréal-Trudeau.

Peu de concret, selon les conservateurs

« Ce n’est rien de plus qu’une séance photo de 5 milliards de dollars. Le premier ministre ne sera plus là dans deux semaines. La ministre des Transports ne se présentera pas aux élections. L’annonce d’aujourd’hui est une déclaration boiteuse d’un gouvernement boiteux », a commenté le député conservateur Philip Lawrence.

Il a fait valoir que les libéraux ont eu neuf ans pour faire avancer le projet, mais n’ont rien de concret à présenter, si ce n’est une dépense à venir de 3,9 milliards sans qu’une seule voie ferrée ne soit installée. Un gouvernement conservateur serait plus proactif, a-t-il affirmé. « Lorsque nous construirons de grands projets, ceux-ci seront transparents, rentables et efficaces. »

L’annonce a été mieux reçue par le Bloc québécois, qui s’est dit soulagé de voir l’option du train à grande fréquence (TGF) enterrée pour de bon. Un TGV sera une réelle option de remplacement pour l’automobile, croient les bloquistes. « L’annonce faite aujourd’hui est en soi une excellente nouvelle qui répond à une vision plus verte et plus moderne des transports », a souligné le député René Villemure.

À Québec, aussi, les réactions ont été plutôt positives. « On a toujours pensé que c’était un projet qui était intéressant. À la fois pour la mobilité et les investissements majeurs, on est pour. On appuie ça. On va voir la suite de l’annonce qui a été faite ce matin », a indiqué le ministre responsable des Infrastructures et ministre responsable de la région de la Capitale-Nationale, Jonatan Julien.

« C’est une excellente nouvelle », a pour sa part déclaré le maire de Québec, Bruno Marchand, qui s’était opposé au précédent projet de TGF. « Ce n’est pas la même facture, mais au moins, elle en vaut la peine. […] La capacité d’attirer des travailleurs et des entreprises grâce à la mise en œuvre de ce TGV-là, c’est inouï. On est le seul pays du G7 qui n’a pas de transport à grande vitesse comme ça, entre ses villes. »

Avec Améli Pineda, Sandrine Vieira, François Carabin et Sébastien Tanguay

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