«The Monkey»: sanguinolentes singeries

Enfant, Hal découvre dans les affaires de son père disparu un bien étrange jouet : un singe qui bat la mesure sur un tambour. Sauf que chaque fois qu’on tourne la clé qui active le mécanisme, quelqu’un meurt, comme a tôt fait de comprendre le jeune Hal. Or, en croyant se débarrasser de Bill, son jumeau tortionnaire, Hal fait une autre découverte : le singe n’exauce pas les souhaits et décide seul de qui périra. Vingt-cinq ans plus tard, Hal devra protéger son fils de Bill… et du singe. Avec la comédie d’horreur The Monkey (Le singe), Osgood Perkins adapte librement une nouvelle de Stephen King sur un ton d’horreur burlesque, loin des langueurs macabres de Longlegs.
Certes, le ton décalé et la manière outrée rebuteront peut-être le public lambda, mais les cinéphiles férus d’horreur apprécieront sans doute davantage la démarche du cinéaste.
De fait, ce que propose Perkins est assez spécifique et s’inscrit en l’occurrence dans la lignée d’un autre film associé à Stephen King : Creepshow (Histoires à mourir debout ; 1982), de George A. Romero, une anthologie en cinq courts récits comico-horrifiques scénarisée par le maître de l’horreur et qui se voulait un hommage aux EC Comics des années 1950 comme Tales from the Crypt et The Vault of Horror.
Le film de Perkins se déroule dans le même genre d’univers un peu intemporel, avec tous ces accessoires et décors renvoyant à diverses époques et où psychologie et logique sont volontairement schématiques. En somme, c’est un exercice de style.
Pour le compte, c’était sans doute là la meilleure approche pour ce matériel précis. À l’écrit, King parvient sans problème à faire en sorte qu’on adhère à l’idée pourtant saugrenue d’un singe jouet maléfique. Cela, en recourant à la suggestion et en épousant le point de vue d’un protagoniste tourmenté.
À l’écran, toutefois, c’est une autre paire de manches. Pour s’en convaincre, il suffit de voir le film de série Z The Devil’s Gift (1984), une première adaptation « officieuse » (d’aucuns parlèrent de plagiat) de la nouvelle qui sombre dans le ridicule en voulant demeurer sérieuse.
En optant, à l’inverse, pour un humour noir paroxystique et des effets sanguinolents hyperboliques, Perkins déjoue les pièges inhérents à la mise en images d’un tel concept de base. Plutôt que d’essayer d’éviter le potentiel grotesque de la proposition, le cinéaste embrasse celui-ci.
Explosions de gore
Pour autant, tout n’est pas réussi. Entre les réjouissantes séquences de morts accidentelles à la Final Destination (Destination ultime), puissance mille, l’intrigue est très mince. Au fond, il y avait peut-être là matière à un épisode dans une anthologie à la Creepshow, justement, plus qu’à un long métrage.
Dans le double rôle de Hal et de Bill adultes, Theo James (les séries The White Lotus et The Gentlemen) n’est en outre guère charismatique. Hétéroclite, la distribution de soutien a tendance à voler la vedette. Du lot, Tatiana Maslany (la série Orphan Black), savoureuse dans le rôle de la mère, tire le mieux son épingle du jeu.
Produit par James Wan (Saw / Décadence ; The Conjuring / La conjuration ; Annabelle ; Malignant / Malfaisant), The Monkey vaut surtout pour ses explosions de gore aussi imaginatives que décomplexées. Il reste qu’on espère voir Osgood Perkins renouer avec la poésie mortifère et l’inquiétante étrangeté de ses précédents The Blackcoat’s Daughter, Gretel and Hansel et Longlegs.
En ce qui concerne The Monkey, le film est pour public averti, et peut-être d’avance conquis.
Des nouvelles de King
Si de nombreux romans de Stephen King, tels Carrie, The Shining, Christine, The Dead Zone, Misery, ou encore Dolores Claiborne, ont donné d’excellents films, ses nouvelles ont en revanche engendré une très inégale production cinématographique. Palmarès des meilleurs films tirés de nouvelles de King.
1. The Shawshank Redemption (À l’ombre de Shawshank), de Frank Darabont, 1994
2. Stand By Me (Compte sur moi), de Rob Reiner, 1986
3. The Mist (Brume), de Frank Darabont, 2007
4. Silver Bullet (Peur bleue), de Daniel Attias, 1985
5. The Night Flier (Les Ailes de la nuit), de Mark Pavia, 1997