Nouveau maître de Bukavu, le M23 mobilise la population pour nettoyer la ville

Bêches, machettes, sacs et balais : moins d’une semaine après s’être rendu maître de Bukavu, chef-lieu de la province du Sud-Kivu dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC), le M23 a réquisitionné les habitants pour une grande opération de nettoyage des rues.
Comme à Goma, capitale de la province voisine du Nord-Kivu conquise le 28 janvier, le groupe armé allié à des troupes rwandaises montre qu’il entend administrer durablement les territoires passés sous son contrôle.
Après avoir rétabli la sécurité à Bukavu, ville d’un million d’habitants tombée sans résistance de la part des forces armées congolaises (FARDC), mais où des miliciens et civils armés ont semé la terreur jusqu’à lundi notamment par des pillages, le M23 s’attaque à l’assainissement.
« Nous sommes en paix parce que » nos troupes « assurent la sécurité ici », a lancé jeudi Lawrence Kanyuka, porte-parole politique du M23, à la population de Bukavu convoquée pour le « salongo » (travaux communautaires).
Le président de la République démocratique du Congo, Félix Tshisekedi, « a mis de la saleté ici […] nous allons chasser Tshisekedi ! Il va partir avec sa saleté ! Faisons notre travail avec courage, reconstruisons chez nous », a-t-il enjoint.
Depuis fin 2021, le M23 a repris les armes dans l’est du pays avec le soutien actif du Rwanda voisin, selon des experts de l’ONU, qui estiment que quelque 4 000 soldats rwandais participent au conflit.
Dans les avenues et ruelles, sur le marché, la population s’active, plus sensible à l’autorité des nouveaux maîtres de la ville qu’à celle des précédentes administrations, lâche un chef de secteur.
« Une réussite »
« Nous sommes ici depuis 6 h et jusqu’à 11 h pour superviser le salongo, tout le monde est actif », assure Bagalwa Rubakuza, chef de l’avenue de la Poste.
« Nous avons toujours organisé des salongo sans succès, mais aujourd’hui c’est une réussite parce que nous sommes soutenus par les nouvelles autorités », se félicite-t-il.
Dans les déclarations ravies des habitants de Bukavu, difficile de démêler la sincérité du souci d’abonder au discours des nouvelles autorités.
« C’est la première fois qu’on voit Bukavu propre. Il y avait vraiment de la négligence, de la paresse et un manque de volonté de la part de nos anciens dirigeants », dit à l’AFP Fabrice Birindwa.
« Tout le monde, jeunes et vieux sommes actifs pour redorer l’image ternie de notre milieu. Bukavu appelée jadis la Suisse d’Afrique est devenue Bukavu la poubelle, il faut qu’il y ait vraiment changement », poursuit-il.
« Si ce genre d’exercice continue, nous aurons vraiment une ville belle et propre », se réjouit un autre habitant, Ferdinand Zihindula.
« Avec ces travaux communautaires, on sent vraiment le changement », abonde Chantal Balemba, vendeuse de tomates au marché de Bukavu.
Certains veulent aller encore plus loin et Bagalwa Rubakuza appelle les nouvelles autorités à « interdire l’importation » de boissons dans des bouteilles en plastique qui contribuent à la pollution de l’environnement de la ville de Bukavu.