«Denis Danger»: le mononcle que tout le monde connaît

« On l’a tournée pour nous faire rire, pour faire rire les plus jeunes », prévient Vincent Bolduc. La première série qu’il réalise est une comédie intergénérationnelle qui raconte la rencontre entre la défunte légende de Québékaraté Denis Danger et sa réincarnation, Anne-Marie Fiori, l’une de ses plus grandes fans, qui, comme lui, est originaire du village de Sainte-Carole. Cette dernière se voit ainsi expressément demander par le spectre de son idole d’enquêter sur les circonstances de sa mort, que la vedette pense douteuses, survenue au beau milieu d’une cascade.

« J’aime ce côté où les personnages se croient beaucoup dans un humour absurde et décalé », explique le réalisateur, à propos de l’écriture de Marie-Hélène Racine-Lacroix. Vincent Bolduc cite notamment en exemple le caractère de Denis Danger, un brin mégalo, même s’il se cantonnait à des personnages de films de série B dans les années 1990. « Je pense que plus il se trouve bon, plus il se trouve crédible, plus c’est drôle. » Mickaël Gouin, qui prête ses traits au protagoniste, aime pour sa part le fait que les personnages tordent la réalité autant qu’ils la représentent, un peu dans la lignée de Dans une galaxie près de chez vous, avec laquelle il a grandi. « Denis Danger, c’est une espèce de mononcle des années 1990 qui incarne tout ce qu’il y a de plus quétaine, qui pense toujours qu’il a raison et qui, en même temps, sort parfois des vérités très sensibles », mentionne-t-il. De fait, Denis Danger ne comprend pas grand-chose à ce qu’Anne-Marie, interprétée par Léanne Désilets, lui dit. Mais qu’importe. « Il y a plein de moments que j’ai trouvés très drôles parce que c’est un peu off et quand le jeu est un peu mauvais, quand les répliques tombent un peu à plat, il y a quelque chose que je trouve très kitsch », s’amuse-t-il.
Rires et nostalgie
« On a ajouté des jokes de Jean-Claude Van Damme, que si le jeune ne pogne pas, ce n’est pas grave », confie le réalisateur. Justement, cet humour extravagant est le ciment capable de réunir autour du visionnage de Denis Danger enfants et adolescents, mais aussi les adultes à travers la nostalgie des années 1980 et 1990. « Il y a des looks avec les cheveux qui sont durs à battre, puis l’esthétique des cassettes VHS et même des mini-DV dans un épisode », indique Vincent Bolduc, qui rappelle être de cette génération qui écumait les clubs vidéo à la recherche des Karaté Kid, Tortues Ninja, Jackie Chan et consorts. Et Mickaël Gouin de rebondir : « Il y a des blagues du genre “la dernière personne qui l’a écoutée a oublié de reculer la cassette”. Probablement que l’ado de 14 ans ne va pas comprendre l’affaire de rembobiner, mais le parent pourra lui dire : “C’est parce que, dans le temps, quand quelqu’un avait loué la cassette avant toi et qu’il ne l’avait pas reculée, ça te mettait en tabarnak.” »

Mickaël Gouin salue en outre la musique de la série, composée par Mario Sévigny et truffée de références à l’époque de sa jeunesse. « C’est full années 1980-1990 ! » S’il pensait au départ à l’ambiance des morceaux de MC Hammer ou de Vanilla Ice, Vincent Bolduc a changé de cap pendant le montage, se tournant plutôt vers le style des Chemical Brothers. « Mario est allé chercher des vieux synthés pour créer quelque chose d’original pour chaque scène, sauf la chanson de Robert Nelson, qui finit l’épisode 1 et qui est une acquisition », souligne le réalisateur, qui mentionne qu’en télévision jeunesse, c’est chose rare.
Cette bande-son habille, entre autres, les scènes de combats de Québékaraté qui jalonnent la série. « On ne voulait pas les doubler, donc ça nous inquiétait », se souvient Vincent Bolduc, finalement impressionné par la maîtrise des coups de pied de Léanne Désilets et de Mickaël Gouin. Avec tout le sérieux du monde, il découvrira sur le tard que l’acteur pratiquait en réalité le taekwondo… « Il y a eu beaucoup de répétitions. Ils ont travaillé fort », assure le réalisateur. Lui et son équipe ont ainsi pris le temps de découper chaque combat comme une chorégraphie qu’ils envisageaient façon Mortal Kombat. « On se promène dans le champ-contrechamp pour aller chercher un coup de poing, un pied, pour ne pas avoir à tout refaire tout le temps. »

Vincent Bolduc avoue enfin qu’il souhaitait faire les choses différemment pour Denis Danger. La qualité de sa série jeunesse se devait d’être au rendez-vous, parce que de plus en plus, les enfants et les adolescents suivent les mêmes émissions que les adultes. « Ils regardent Stranger Things. Ils sont habitués à une qualité d’image, à une qualité sonore, à une qualité de coupe », estime-t-il. Le réalisateur et père de trois enfants sait parfaitement que leurs goûts changent vite. « C’est un public qui est très critique et très intelligent. » Attentif à ce que les jeunes ont envie de consommer à l’écran, Mickaël Gouin se réjouit d’avoir eu la chance de participer à quelque chose qu’on ne voit pas souvent au Québec. « La télé jeunesse, c’est vraiment important d’en faire, et d’en faire de la bonne, parce que c’est la relève de notre culture », conclut-il.