Des absences d’élèves aux lourdes répercussions

Qu’elles soient le fait de maladies, de vacances en famille ou d’activités sportives, les absences d’élèves préoccupent, car elles peuvent nuire durement à la réussite de certains, en plus d’alourdir le travail des enseignants et des directions d’écoles. Deuxième texte d’une série de trois.
Dans plusieurs régions du Québec, des syndicats d’enseignants déplorent le fait que les absences d’élèves génèrent une surcharge de travail importante pour leurs membres.
Le Syndicat de l’enseignement de l’Ouest de Montréal note ainsi que ses membres sont confrontés à un « véritable casse-tête » lorsque vient le temps de gérer le rattrapage de matière pour les élèves qui se sont absentés durant plusieurs jours.
« Quand et comment revoir la matière avec les élèves ? Durant les récréations, le soir, ou en les retirant d’autres cours ? Toutes ces options sont loin d’être idéales, et dans un contexte de pénurie de personnel, nous manquons de ressources pour accompagner les élèves dans leur rattrapage sans affecter les autres activités éducatives », ajoute l’organisation par courriel.
Le Syndicat de l’enseignement de l’Outaouais constate lui aussi que ses membres vont régulièrement « dépasser les heures prévues » dans leur contrat de travail afin d’accompagner les élèves qui ont manqué des journées d’école, par exemple sur l’heure du midi ou à la fin des cours. « Cet enjeu est très perceptible et irritant pour nos membres », ajoute sa présidente, Nathalie Gauthier.
En légère hausse à Montréal
Ces préoccupations d’enseignants surviennent au moment où les trois centres de services scolaires (CSS) francophones de la métropole font état, depuis le début de l’année scolaire en cours, d’une légère hausse du taux d’absentéisme de leurs élèves par rapport à 2023-2024.
Le CSS Marguerite-Bourgeoys évalue ainsi le taux d’absences d’élèves à des journées entières de cours dans les derniers mois à 3,7 % au primaire et à 3,1 % au secondaire. Ces pourcentages atteignent respectivement 5,8 % et 9,3 % au sein du CSS de Montréal, qui compte quelque 114 000 élèves.
« Nous comprenons que des imprévus peuvent survenir, mais chaque moment compte dans les apprentissages, et les absences (et retards) peuvent avoir des impacts chez l’élève concerné », indique par courriel le CSS de Montréal, qui assure que « la gestion de l’assiduité se fait de façon rigoureuse » dans ses écoles.
Une mince augmentation est aussi notée cette année au CSS de la Pointe-de-l’Île, où le taux d’absentéisme atteint 4,09 % au primaire cette année et 3,29 % au secondaire.
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Mise en place de « balises »
Certaines des absences d’élèves sont liées, notamment, à des maladies, à des rendez-vous avec des spécialistes de la santé ou encore au décès d’un membre de leur famille. Ce qui préoccupe cependant plusieurs acteurs du milieu scolaire, ce sont les absences qui seraient associées à des activités sportives et à des vacances familiales.
Les directions d’écoles rencontrent ainsi régulièrement des parents après avoir été informées d’absences à venir d’élèves dans certaines classes afin de les « sensibiliser » aux impacts que ces absences pourraient avoir sur la réussite scolaire de leurs enfants, souligne la présidente de l’Association montréalaise des directions d’établissement scolaire, Kathleen Legault. « On décourage toujours les parents de partir pendant les journées de classe » lorsque le motif de leur absence n’est pas sérieux, souligne-t-elle.
La présidente de la Fédération autonome de l’enseignement, Mélanie Hubert, constate d’ailleurs que certaines écoles ont mis en place des « balises » pour éviter que des enseignants aient à fournir de la matière aux parents qui partent en vacances et souhaitent permettre à leurs enfants de continuer à suivre le contenu de leurs cours pendant cette période.
Le CSS des Mille-Îles, dans les Laurentides, rappelle d’ailleurs que l’enseignant « n’a pas l’obligation de fournir du travail scolaire pendant les absences pour cause de voyage ou de compétition sportive des élèves » et qu’il est de « la responsabilité de l’élève et de ses parents de minimiser l’impact de leurs vacances sur son parcours et sa réussite scolaires ».
« Je pense qu’il y a une préoccupation dans les milieux pour que tout ça ne devienne pas une surcharge » pour les enseignants, note ainsi Mme Hubert.
Plus de matière à la veille des congés
Au moment où le ministère de l’Éducation affirme explorer différentes avenues pour valoriser l’assiduité scolaire, le président de la Fédération québécoise des directions d’établissement d’enseignement, Nicolas Prévost, propose que plus de matière soit enseignée dans les journées qui précèdent des congés fériés, ce qui pourrait, selon lui, décourager des parents d’organiser des voyages avec leurs enfants pendant ces périodes.
« Je ne dis pas qu’on ne doit pas avoir des activités spéciales de temps en temps, mais on a le rôle de rentabiliser ces 180 jours pour que ce soit des jours avec de l’apprentissage », estime-t-il.
La professeure titulaire au Département de psychoéducation et de psychologie de l’Université du Québec en Outaouais, Kristel Tardif-Grenier, plaide pour sa part pour l’instauration de « normes » provinciales qui viendraient délimiter un « seuil minimal » de jours de présence scolaire par année pour les élèves, « du moins pour encadrer les absences qui ne sont pas justifiées sur le plan médical ». Actuellement, les absences sont gérées au cas par cas, « à la discrétion de chaque école », souligne-t-elle. « Et ça, c’est un enjeu. »