La Ville de Québec prévoit payer comptant sa part du tramway

L’administration de Bruno Marchand a annoncé mardi qu’elle ne comptait pas faire d’emprunt pour payer sa part du tramway, qui s’élève à environ 675 millions de dollars. Pour y arriver, elle compte de nouveau recourir à sa réserve pour changements climatiques.
Le maire et son directeur général, Luc Monty, ont présenté mardi un plan de financement jusqu’à 2034. Celui-ci permettrait à la Ville de « sauver 500 millions de dollars » en intérêts sur la dette, a déclaré le maire.
Concrètement, la Ville compte injecter 15 millions supplémentaires dans sa réserve climatique chaque année. Ainsi, de 15 millions en 2023, les versements passeront à 90 millions en 2028, pour un total de 315 millions de dollars cumulés. Ce fonds, qui devait normalement se remplir d’ici à 2028, voit donc ses activités prolongées de six ans de plus.
La réserve climatique s’impose ainsi comme un outil de choix pour l’administration Marchand, qui y a aussi recouru pour boucler son dernier budget.
La Ville compte aussi sur les revenus additionnels d’impôt foncier qu’elle prévoit récolter le long du tramway. Or, l’idée de prélever une redevance aux promoteurs qui investiront le long du parcours est mise de côté.
Le maire et son directeur général estiment à 2 milliards de dollars les investissements près du parcours, qui doit s’étirer du pôle Le Gendre, dans l’ouest de la ville, au secteur d’Estimauville, dans l’arrondissement de Beauport.
Lundi, la Ville, le gouvernement du Québec et la CDPQ Infra ont présenté une nouvelle version du projet, estimé à 7,6 milliards, qui serait livré dans neuf ans.
Contenir les dépenses
L’ajout chaque année de 15 millions de plus au budget pour financer le tramway est « vivable », a assuré le maire Marchand. D’emblée, la Ville a déjà l’habitude de réserver des fonds au paiement comptant des immobilisations, a souligné le directeur général, Luc Monty. « Il faut contenir nos dépenses à un rythme raisonnable […] Cet exercice-là, quand il est fait sur une base continue, ça fonctionne. »
Le maire se défend en outre de « pelleter en avant » en engageant des dépenses à très long terme. « Pelleter en avant, ce serait mettre ça sur la dette », a-t-il avancé.
Quant à savoir si la Ville se prive ainsi de marge de manœuvre dans l’avenir, M. Marchand réfute l’idée. « On a une bonne santé financière. Et en attirant autant de gens à venir ici, ça va augmenter nos revenus et nous donner de la marge foncière pour faire d’autres projets. »
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Enfin, lorsqu’on l’a questionné sur le risque qu’une administration future décide de ne pas injecter les 15 millions supplémentaires, le maire Marchand a dit que c’était possible, mais que les conséquences seraient graves. « Ça va dépendre où il est rendu, mais on avance très vite, a-t-il dit. On a déjà 540 millions de dépensés collectivement. »
« En plus de tous les impacts négatifs de ne pas le faire, il y aurait un impact financier sur la Ville. […] Dans l’entente, si nous nous retirons, on va avoir des pénalités. »
Incertitude du côté d’Ottawa
L’entente conclue avec le gouvernement Legault prévoit que la contribution de la Ville de Québec soit au minimum de 600 millions et au maximum de 750 millions. Une protection importante pour les contribuables, a souligné le maire. En cas de dépassement de coûts, il appartiendrait aux autres partenaires du projet d’allonger de nouveaux fonds.
À cet égard, la contribution de l’un d’eux, le fédéral, continue de susciter des inquiétudes. Absent lors de l’annonce de lundi, le gouvernement Trudeau s’est engagé à verser 1,5 milliard alors que l’entente originelle prévoyait qu’il finance l’équivalent de 40 % du projet (soit près de 3 milliards). Une incertitude que l’élection probable des conservateurs, dirigés par Pierre Poilievre, accentue encore davantage, ce dernier se présentant comme un adversaire du projet.
Questionné à plusieurs reprises là-dessus, le maire Marchand s’est montré confiant et a promis une « première pelletée de terre au printemps ». « Est-ce qu’il ne peut pas y avoir une hécatombe politique qui change les choses ? Oui, mais ça, c’est tout le temps le cas. Présentement, on n’a jamais été aussi loin dans la réalisation de ce projet-là. »
Deux des trois partis d’opposition ont donné leur appui à l’entente entre le gouvernement et la Ville. Le chef de Québec d’abord, Claude Villeneuve, l’a qualifiée d’« avantageuse », notamment en raison du plafond de 750 millions donné à la contribution de la Ville. Même chose pour Jackie Smith, de Transition Québec, qui a salué la qualité du montage financier.
Équipe Priorité Québec s’est toutefois montré très sceptique. « Sans le fédéral, il n’y a pas de plan financier », a déclaré son chef, Patrick Paquet, dont le parti est opposé au projet depuis le début. « C’est un projet qui est loin d’être sur les rails. Il y a trop de variables », a dit son collègue Stevens Mélançon.