De la vigne au verre: le sangiovese en lumière

Michelle Bouffard
Collaboration spéciale
Poggiotondo Chianti, en Toscane
Photo: Photo fournie par le vignoble Poggiotondo Chianti, en Toscane

Ce texte fait partie du cahier spécial Plaisirs

On le propose en carafe comme vin de la maison dans les trattorias, mais il est également à l’origine de plusieurs vins emblématiques qui émerveillent les collectionneurs après plusieurs années en cave. Le sangiovese est le cépage rouge le plus cultivé d’Italie, avec près de 65 000 hectares, mais il reste discret sur les étiquettes, où figurent plutôt les noms des appellations. Ce qui est certain, c’est que, malgré son caractère affirmé, son profil se décline en une riche palette de nuances selon la région, la méthode de vinification et la touche personnelle de l’artisan. Et lorsqu’il accompagne un bon repas, il devient irrésistible.

Son origine

Le sangiovese porte plusieurs noms, tels que morellino, negrello et nielluccio, pour n’en nommer que quelques-uns, et jusqu’à récemment, on attribuait son origine à la Toscane. Cependant, depuis les recherches menées en 2004 par l’ampélographe José Vouillamoz et son équipe, qui ont démontré que le cépage est issu d’un croisement entre les variétés ciliegiolo et calabrese di montenuovo, on soupçonne désormais une origine calabraise. Quoi qu’il en soit, son royaume reste incontestablement la Toscane, où il atteint son apogée. On trouve également de délicieux joyaux, souvent abordables, en Émilie-Romagne, en Ombrie et dans les Marches. À l’extérieur de la péninsule italienne, la Corse occupe une place de choix, avec d’excellents vins sous le nom de nielluccio, notamment dans l’appellation Patrimonio, où il constitue un minimum de 60 % de l’assemblage. Enfin, on le retrouve dans plusieurs autres pays, dont la Grèce, la Turquie, la Californie, l’Australie, et même en Ontario et en Colombie-Britannique, bien que sa présence y soit bien plus limitée.

Son profil sensoriel

Dans le verre, sa couleur est rubis, tendant fortement vers le grenat, même en jeunesse. En bouche, il se distingue par son acidité élevée, ses tanins puissants et ses arômes oscillant entre la cerise rouge, la prune et les herbes séchées, voire parfois des effluves de plants de tomates et de balsamique. Lorsqu’il est élevé en fût de chêne neuf, des notes de vanille et d’épices viennent s’ajouter à la palette aromatique. Les meilleurs exemples possèdent une structure qui permet au vin de se bonifier avec le temps, où les arômes tertiaires (notes qui se développent après quelques années en bouteille) de gibier, de cuir et de tabac amènent complexité et profondeur.

Certes, il détient la génétique pour faire de grands vins, à condition qu’il soit cultivé dans les bons endroits et qu’on adopte des pratiques irréprochables dans le vignoble. Les chiantis insipides, souvent vendus dans une bouteille ornée de paille dans les années 1970 et laissant de mauvais souvenirs, n’étaient que le résultat de vins de volume où les rendements élevés, préconisés à l’époque, accentuaient l’acidité et produisaient des vins dilués, bien loin des atouts du sangiovese. Heureusement, grâce à la persévérance de vignerons talentueux, à l’amélioration de la viticulture et de la vinification, ainsi qu’à une meilleure compréhension du cépage et des terroirs, les choses ont changé !

Souvent accompagné

Le sangiovese est couramment en assemblage avec d’autres cépages avec l’objectif d’équilibrer son acidité marquée et ses tanins puissants. Les producteurs cherchent ainsi à créer des vins harmonieux et/ou plus accessibles en jeunesse. Cela se reflète d’ailleurs dans les décrets de plusieurs appellations, telles que Chianti et Vino Nobile di Montepulciano (minimum de 70 % de sangiovese) ainsi que Chianti Classico (minimum de 80 % de sangiovese), où l’ajout d’autres variétés que le sangiovese est autorisé.

Les puristes préfèrent mettre une dose de cépages autochtones tels que le canaiolo et le colorino, affirmant que les cépages internationaux, comme le cabernet sauvignon, le merlot ou la syrah, adoptés par les modernistes, dominent le profil organoleptique du vin. Il faut des années d’expérience pour se forger une opinion, mais il est certain que de délicieuses versions sont produites dans les deux cas.

Attention : cela ne veut pas dire qu’un vin fait uniquement de sangiovese ne peut pas être harmonieux ! Dans le sud de la Toscane, les vins de la prestigieuse appellation Brunello di Montalcino, constitués exclusivement de sangiovese, en sont un bon exemple. Un climat plus chaud et plus sec que celui des régions de Chianti et Chianti Classico, ainsi que les brises marines du sud-ouest, permettent d’élaborer des vins riches, structurés et distingués, qui demandent plusieurs années en cave pour révéler leur profondeur.

L’ami du fût

Une autre technique de vinification fréquemment utilisée pour le sangiovese est le vieillissement en fût. La micro-oxygénation offerte par le bois permet à la fois de stabiliser la couleur, d’assouplir les tanins et de favoriser l’intégration de l’acidité, tout en permettant le développement des arômes du vin. L’âge et la taille du fût varient selon la philosophie du producteur et le type de vin recherché. Les traditionalistes ont tendance à opter pour de grands fûts usagés (appelés botti), car ceux-ci favorisent l’élevage sans laisser de trace marquée des arômes du bois sur le vin. D’autres préfèrent des nuances boisées dans la signature de leur vin, en utilisant des fûts neufs de petite taille. Ceux qui privilégient l’expression du fruit croquant choisissent des cuves en béton ou en inox.

Le sangiovese est un univers en soi et la meilleure façon de l’apprécier dans toute sa richesse, c’est à table. Alors que son acidité marquée fait de lui une option idéale pour les plats tomatés, ses tanins puissants se fondent en présence de protéines. Voici une sélection de vins abordables pour explorer toutes ses facettes et apporter un peu de chaleur aux journées grises de janvier. Une combinaison parfaite pour une soirée gourmande, surtout lorsqu’il est accompagné d’une pizza margherita ou d’un spaghetti alla puttanesca. Rendez-vous la semaine prochaine avec des vins de la péninsule ibérique !

Suggestions de la semaine

Poggiotondo Chianti DOCG 2023
85 % sangiovese, 10 % canaiolo, 5 % colorino
* certifié bio
17,25 $ — Code SAQ 15106633

Volpaia Citto Toscana IGT 2023
80 % sangiovese, 20 % cabernet sauvignon
Issu de raisins cultivés à Radda, à Chianti et à Maremma sur les propriétés de la famille Stianti Mascheroni
* certifié bio
17,55 $ — Code SAQ 14044653

San Valentino Scabi Sangiovese di Romagna Superiore DOC 2022
100 % sangiovese
* certifié bio
18,55 $ — Code SAQ 11019831

Morisfarms Morellino di Scansano DOCG 2022
90 % sangiovese, 5 % merlot, 5 % syrah
* bio non certifié
20,60 $ — Code SAQ 13466205

Le Ragnaie Troncone Toscana IGT 2022
100 % sangiovese
Issu de jeunes vignes cultivées en altitude juste à l’extérieur des limites permises pour l’appellation Brunello di Montalcino.
* certifié bio
21,95 $ — Code SAQ 13432515

Castello di Bossi Chianti Classico DOCG 2021
100 % sangiovese
22,95 $ — Code SAQ 13465958

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