De la vigne au verre: miser sur la viticulture régénérative

Michelle Bouffard
Collaboration spéciale
Au domaine Meinklang, en Autriche, la vigne côtoie le bétail ainsi que des céréales et des arbres fruitiers.
Photo: Meinklang Au domaine Meinklang, en Autriche, la vigne côtoie le bétail ainsi que des céréales et des arbres fruitiers.

Ce texte fait partie du cahier spécial Plaisirs

La viticulture régénérative suscite beaucoup d’intérêt ces dernières années. Fondée à partir de connaissances et d’avancées scientifiques, elle propose un modèle de référence ultime. L’intention est de créer un écosystème durable et, pour y arriver, on préconise cinq grands axes : améliorer la santé des sols ; réduire, voire éliminer les produits de synthèse pour protéger les ressources naturelles ; promouvoir la diversité des plantations pour favoriser la biodiversité ; intégrer des animaux ; enfin, renforcer la résilience des communautés. Cette approche exige une longue démarche, car il ne s’agit pas d’une recette universelle applicable uniformément d’un terroir à l’autre. Chaque producteur doit trouver les pratiques adaptées à son propre vignoble. La viticulture régénérative est complexe, c’est pourquoi cette rubrique s’étendra sur deux semaines.

Accroître la matière organique

Depuis l’émergence de l’agriculture conventionnelle dans les années 1970, le tiers de la couche arable de la terre (la couche supérieure du sol et celle qui contient la plus forte concentration de matière organique) a été perdu. Selon les Nations unies, sans mesures collectives du secteur agricole, nous risquons de la voir disparaître dans les 60 prochaines années. Une perspective préoccupante, car la désertification entraîne la famine et contribue aux changements climatiques.

Promouvoir la santé des sols et accroître la matière organique est donc fondamental et constitue l’une des raisons d’être de la viticulture régénérative. Pour y parvenir, plusieurs méthodes doivent être adoptées, telles que l’utilisation de couverts végétaux (céréales, légumes, légumineuses, etc.) entre les rangs de vignes, l’application de compost, ainsi que l’intégration d’animaux d’élevage herbivores, comme les vaches, dont les excréments sont des fertilisants naturels. De plus, il est essentiel de s’éloigner des produits chimiques qui détruisent la vie dans les sols et d’éviter l’emploi de machines lourdes qui les compactent. L’ensemble de ces techniques prévient la dégradation des sols, favorise la fertilité, la rétention d’eau et la vie microbienne en plus de contribuer à la séquestration du carbone dans les sols. Enfin, il est primordial de ne pas labourer la terre afin que le CO2 reste stocké dans le sol.

Favoriser la séquestration carbone

Selon l’Institut Rodale, un organisme de recherche spécialisé en agriculture régénérative depuis 1947, il serait possible de séquestrer 100 % du CO2 émis chaque année si le secteur agricole adoptait ces pratiques durables. L’industrie viticole peut donc jouer un rôle majeur dans la réduction des gaz à effet de serre. Cependant, il est difficile d’évaluer précisément la quantité de CO2 qu’un vignoble peut séquestrer, car l’équation varie en fonction du climat, du type de sol et des cultures plantées. Des études sont en cours, dont plusieurs menées par le groupe Domaines viticoles internationaux pour l’action climatique (International Wineries for Climate Action, IWCA). La maison en biodynamie Cullen Wines, à Margaret River, fait partie de ces études de cas. Depuis les premières analyses de sol en 2014, on a observé une augmentation de 1,9 % du carbone organique des sols, ce qui équivaut à 79,5 t/ha de carbone séquestré, soit 1910 tonnes d’éqCO2 par an. Cela compense largement les 1600 tonnes d’éqCO2 produites annuellement par le domaine. Des statistiques qui donnent de l’espoir !

Déjà, à travers les répercussions de la santé des sols, nous pouvons percevoir les conséquences positives de l’adoption de la viticulture régénérative. La semaine prochaine, le rôle de la biodiversité dans un vignoble ainsi que les incidences bénéfiques sur les communautés seront examinés. D’ici là, un verre à la main, je vous propose de visionner deux documentaires qui démontrent la puissance de cette forme d’agriculture : Kiss the Ground (2020) et The Biggest Little Farm (2018).

Voici trois producteurs qui adhèrent à cette forme de viticulture.

Meinklang Grüner Veltliner 2023, Österreichischer Qualitätswein, Autriche

Une famille inspirante qui adopte pleinement les principes de l’agriculture régénérative : dans la ferme de 2000 hectares, la vigne côtoie le bétail ainsi que des céréales et des arbres fruitiers. Ce grüner veltliner s’est imposé comme un incontournable à la SAQ et, encore cette année, il ne déçoit pas. Son nez expressif s’ouvre sur des notes de mélisse, de zeste de citron, de nectarine et une pointe de poivre blanc. Léger et juteux en bouche, il offre une belle fraîcheur qui, alliée à ses 11 % d’alcool, étanche la soif et garantit une grande buvabilité. Savoureux avec du sushi.

20,85 $ – Code SAQ 13631071

Domaine Cazes Samsó Cinsault Nature 2023, Côtes Catalanes IGP, France

Depuis 25 ans, cette maison fait régulièrement des analyses de sol et constate que la matière organique continue de s’accroître en raison de bonnes pratiques. Cela permet, tant lors des années de stress hydrique que dans les années pluvieuses, d’avoir des rendements stables. Grâce à ce travail et au cinsault, qui est parfaitement adapté aux changements climatiques, on obtient un vin gourmand, mais éclatant et gouleyant. Des notes croquantes de fraises sauvages et de framboises s’harmonisent avec les nuances de garrigues. Les tanins sont mûrs, souples et soyeux, et la bouche est très invitante. Parfait pour la longe de porc au romarin. Servir légèrement frais.

22,40 $ – Code SAQ 15347963

Cosse et Maisonneuve Les Beraudies « Blanc » 2022, Vin de France

Il est rare de rencontrer quelqu’un qui comprend l’agronomie comme Catherine Maisonneuve, copropriétaire. Tout est réfléchi, et les pratiques visant à promouvoir la vie souterraine et la santé des vignes sont irréprochables. Alors que cette maison est reconnue pour ses malbecs élégants, ce blanc est une nouveauté au domaine. Le vin est composé à parts égales de chardonnay et d’ugni blanc, mais puisqu’ils sont interdits dans l’appellation de Cahors, la bouteille se vend sous l’appellation « Vin de France ». Le côté variétal des cépages est en retrait, tandis que la salinité, la vitalité et la matière en milieu de bouche sont à l’avant-plan. Structuré avec une belle amplitude et des arômes floraux qui se mêlent aux agrumes et au melon miel. Un appel aux pétoncles poêlés.

21,90 $ – Code 15360771

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