De la vigne au verre: découvrir les Finger Lakes
Collaboration spéciale

Ce texte fait partie du cahier spécial Plaisirs
Les conditions climatiques des Finger Lakes, dans l’État de New York, frôlent les limites extrêmes pour la culture de la vigne. Bien que les changements climatiques permettent d’atteindre plus facilement les maturités désirées des raisins, la viticulture demeure un défi. Les gels hivernaux et printaniers constituent des obstacles récurrents, entraînant fréquemment des pertes de récolte importantes. Cependant, la passion, la résilience, l’accumulation du savoir-faire au fil des décennies ainsi que l’arrivée de nouveaux acteurs apportant des perspectives novatrices dessinent un avenir prometteur pour nos voisins du Sud.
Les grandes lignes
Nous avons très peu accès aux vins de l’État de New York. Pourtant, cette région est la troisième plus productive des États-Unis, après la Californie et Washington, et c’est dans les Finger Lakes que se concentre l’exploitation. Dans ce climat continental marginal, la présence des 11 lacs formés par les glaciers lors de la dernière période glaciaire joue un rôle déterminant dans la viabilité de la viticulture. En plus de modérer les températures extrêmes des froids hivernaux et des chaleurs estivales, ces lacs créent un microclimat qui retarde le débourrement des bourgeons au printemps, diminuant les risques de gelées printanières, tout en prolongeant la saison de croissance à l’automne. Le lac Seneca est particulièrement important, car, grâce à ses 182 mètres de profondeur, il ne gèle pas en hiver, réchauffant ainsi les vignobles plantés à proximité. Les autres vignes se concentrent principalement autour des lacs Cayuga, Keuka et Canandaigua.
Des vins à l’air du temps
La tendance mondiale s’oriente vers les vins digestes, marqués par la fraîcheur, souvent à teneur plus faible en alcool. Ce profil correspond parfaitement à ce que l’on trouve dans les Finger Lakes.
Le riesling est le porte-étendard, et sa qualité se distingue. Les styles varient de sec à doux mais, peu importe la signature, ils partagent un profil délicat, une acidité vive et des nuances qui oscillent entre les fruits à noyau, les agrumes et la fleur blanche. Les meilleurs ont un excellent potentiel de vieillissement. D’ailleurs, une visite à Keuka Spring Vineyards permet de goûter de vieux millésimes.
Aux côtés du riesling rayonne le cabernet franc. Une dégustation chez Ravines confirme qu’il a un futur plein d’espoir ; leurs rouges sont purs, alliant maturité et fraîcheur, avec un profil floral et de mine de crayon qui évoque les rouges du Val de Loire. On trouve aussi les suspects habituels, qui s’épanouissent dans les climats frais, comme le chardonnay et le pinot noir. Enfin, un engouement renouvelé pour les cépages autochtones d’Amérique et les hybrides se fait sentir, car ces derniers sont résilients face aux hivers rigoureux.
Évolution qualitative
Le récit des Finger Lakes n’est pas récent ; il débute en 1829 à Keuka Lake, où les premières vignes sont plantées. Cependant, l’histoire moderne, axée sur des vins qualitatifs, l’est. Pionnier originaire de la Moselle, Hermann J. Wiemer incarne le progrès des dernières décennies. Il s’installe à Seneca en 1979, percevant un parallèle entre sa région natale, réputée pour ses rieslings, et le potentiel des Finger Lakes. Visant la qualité dès le départ, à une époque où d’autres misaient sur les rendements et la production de jus Welch’s, il devient une source d’inspiration. Aujourd’hui, Fred Merwarth et Oskar Bynke ont repris le flambeau et, à leur tour, repoussent les limites du possible. Ils ont abandonné les produits de synthèse pour se tourner vers la viticulture régénérative, un mouvement en essor dans la région. Leurs rieslings et blaufränkisch épatent, et les cépages expérimentaux, comme la petite arvine, sont prometteurs.
La relève
L’arrivée de nouveaux visages continue de propulser les Finger Lakes, et Christopher Bates symbolise cette dynamique. Chef émérite, Master sommelier et propriétaire du F.L.X. Hospitality, Bates est surdoué. Après avoir parcouru les meilleurs vignobles du monde, c’est sur sa terre natale qu’il décide de parier en démarrant Element en 2009. Ses expériences à l’étranger lui permettent d’avoir du recul ; il est convaincu que le meilleur est à venir, misant sur l’élaboration de vins délicats, à l’image du terroir. Son travail est intuitif et le résultat, impressionnant : ses vins sont texturés et remplis de vitalité.
L’offre des vins de l’État de New York reste limitée, mais une courte escapade permet d’explorer un monde de possibilités. Autrement, la Grande Dégustation de Montréal, qui se tiendra du 28 au 30 novembre, offrira l’occasion de les découvrir. Voici trois cuvées pour vous inspirer. On se retrouve la semaine prochaine pour se mettre dans l’esprit des Fêtes !

Element chardonnay 2017, Finger Lakes
Les chardonnays d’Element sont de loin les plus complets que j’ai dégustés aux Finger Lakes. Vifs et texturés, avec une belle amplitude et un profil qui évoque les blancs du Jura. La légère pointe oxydative ajoute de la profondeur et se fond aux notes de citron Meyer, de noisette et de rayon de miel. Très long en bouche. Idéal pour une blanquette de veau avec une sauce aux morilles.
55,00 $ — En importation privée par caveartetvin.com
Ravines dry riesling 2021, Finger Lakes
Incontournable, cette maison produit des vins d’excellente qualité, et ce riesling en témoigne. Sec, vif et vertical, sans toutefois être austère. Doté d’une belle concentration d’arômes qui s’ouvre sur des notes de zeste de lime et de pamplemousse rose, avec une impression de minéralité en fin de bouche. Excellent avec un curry de poisson.
31,00 $ — Code SAQ 12289534 (de retour à la SAQ en 2025)
Osmote riesling 2021, Seneca Lake
Benjamin Riccardi fait partie de la jeune génération qui est revenue au bercail après avoir accumulé son expérience auprès d’autres appellations du monde. En attendant la récolte des vignes plantées en 2024, il achète des raisins. Un vin sec et tonique, avec de la mâche en milieu de bouche, qui vient donner des courbes à la structure compacte. Au nez, on trouve les nuances classiques du riesling : agrumes et fruits à noyau, avec une touche de kérosène. Savoureux avec un tataki de thon.
24,00 $ — Disponible sur vinoshipper.com/shop/osmote
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