Trump rêve de «domination» énergétique grâce aux énergies fossiles

Donald Trump promet d’augmenter la production d’énergies fossiles aux États-Unis en facilitant l’accès au territoire pour les entreprises de forage.
Photo: Getty Images via l’Agence France-Presse Donald Trump promet d’augmenter la production d’énergies fossiles aux États-Unis en facilitant l’accès au territoire pour les entreprises de forage.

Donald Trump avait promis de tout faire pour favoriser l’expansion de l’industrie des énergies fossiles et il a commencé à tenir sa promesse dès le premier jour de sa présidence, tout en confirmant que les États-Unis, deuxième émetteur mondial de gaz à effet de serre, quitteront l’Accord de Paris. Si ces décisions semblent confirmer les craintes des défenseurs de l’environnement, elles ne signifient pas nécessairement que les entreprises voudront exploiter davantage de pétrole et de gaz.

Donald Trump a profité de son discours inaugural pour réaffirmer son intention d’accroître la « domination énergétique » de son pays en exportant des ressources « partout dans le monde ». « We will drill, baby, drill », a-t-il martelé, en évoquant « l’or liquide » du sous-sol américain, soit son pétrole, et en dénonçant « l’extrémisme » climatique de son prédécesseur, Joe Biden.

Le milliardaire climatonégationniste compte sur une déclaration d’« urgence énergétique nationale » pour faciliter la croissance de la production dans le pays. Il espère ainsi réduire la réglementation et augmenter la superficie de territoires ouverts à l’exploration pétrolière et gazière (notamment en milieux marins et en Arctique), et ce, malgré les risques bien connus pour les écosystèmes et pour le climat de la planète. Pour parvenir à ses fins, il devra toutefois passer par un processus politique qui risque de prendre un certain temps, et ce, afin d’annuler des mesures prises récemment par le président sortant, Joe Biden, pour protéger des milieux naturels.

Titulaire de la Chaire de gestion du secteur de l’énergie de HEC Montréal, Pierre-Olivier Pineau doute de la volonté des entreprises d’augmenter leur production d’énergies fossiles. « Les producteurs seront peu enclins à augmenter une production déjà record, dans un contexte de prix plutôt bas et d’incertitude économique, notamment liée aux politiques de [Trump], qui sont de nature à créer des ralentissements économiques, et donc une décroissance de la demande d’hydrocarbures », explique-t-il, en rappelant que le « déploiement » des véhicules électriques se poursuivra malgré Trump.

« Tout ce contexte fait en sorte qu’il est très improbable que la présidence de Trump pousse les producteurs aux États-Unis à produire beaucoup plus d’hydrocarbures. Les entreprises n’y sont pas poussées par les prix ni par les perspectives de marché », résume M. Pineau.

Aucune « crise climatique »

Les États-Unis représentent déjà un poids lourd dans la production d’énergies fossiles dans le monde. L’exploitation des énergies qui alimentent la crise climatique a connu des années fastes sous la présidence de Joe Biden. Les États-Unis sont aujourd’hui le premier producteur mondial de pétrole (plus de 13 millions de barils par jour) et le premier exportateur de gaz naturel liquéfié (GNL). Uniquement avec les projets déjà approuvés, la capacité d’exportation de GNL du pays devrait être multipliée par quatre au cours des prochaines années. Et une fois que le moratoire imposé sous Biden sera levé par le gouvernement Trump, plus d’une vingtaine de projets supplémentaires pourraient voir le jour.

Selon les experts du domaine de l’énergie, la seconde présidence de Trump risque donc de provoquer un ralentissement de la nécessaire transition énergétique. Donald Trump est notamment un opposant farouche à la construction d’éoliennes. Dans un communiqué publié lundi, il a d’ailleurs dit vouloir interdire les nouveaux projets éoliens, qui « dégradent nos paysages naturels » et seraient, selon lui, un échec énergétique.

Son secrétaire à l’Énergie, Chris Wright, est le fondateur de Liberty Energy, une entreprise spécialisée dans la fracturation hydraulique qui a permis aux États-Unis d’augmenter radicalement leur production pétrolière et gazière. Il a déjà affirmé qu’« il n’y a pas de crise climatique et nous ne sommes pas non plus en pleine transition énergétique ». Selon ce qu’il a également soutenu, « le terme de pollution par le carbone est scandaleux », car toute vie dépend du CO2. Les émissions de gaz à effet de serre annuelles des États-Unis dépassent les 6 milliards de tonnes d’équivalent CO2.

Sortie de l’Accord de Paris

Le gouvernement Trump a par ailleurs annoncé lundi son intention de revoir la réglementation permettant d’accroître le parc de véhicules électriques, au nom de la protection de l’industrie automobile américaine et de la liberté de choisir son véhicule personnel.

Il a également confirmé que les États-Unis se retireraient une deuxième fois de l’Accord de Paris sur le climat, ce qui mettra à mal les efforts mondiaux de lutte contre le réchauffement climatique. « Le président Trump se retirera de l’Accord de Paris sur le climat » a déclaré la Maison-Blanche dans un communiqué détaillant les « priorités » du nouveau gouvernement. Il a officialisé cette intention en soirée lundi, signant un décret prévoyant la sortie de l’Accord, au stade Capital One, au centre-ville de Washington. Les États-Unis avaient déjà quitté l’Accord sous le premier mandat du républicain et ce nouveau retrait deviendra officiel dans un an.

« Nous sommes à un moment où, dans le monde entier, nous devons accélérer nos efforts, redoubler nos engagements, et cela va à l’encontre de cet objectif », a déclaré Julie McNamara, de l’organisation américaine Union of Concerned Scientists, citée par l’Agence France-Presse.

« Il n’y a pas d’urgence énergétique aux États-Unis en ce qui concerne les combustibles fossiles, mais il y en a une en ce qui concerne la lutte contre le changement climatique », a aussi fait valoir Athan Manuel, de l’organisation Sierra Club.

Certains se veulent toutefois confiants. « Le retrait des États-Unis de l’Accord de Paris est regrettable, mais l’action multilatérale pour le climat s’est avérée résiliente », a assuré Laurence Tubiana, architecte de l’Accord de Paris, dans un communiqué. Et « le contexte actuel est très différent de celui de 2017. La transition mondiale bénéficie d’un élan économique imparable », a-t-elle souligné.

Les répercussions environnementales potentiellement négatives du retour de Trump de la présidence ne s’arrêteront pas aux frontières et elles risquent de pousser le Canada à mettre la hache dans ses propres règles environnementales et ses objectifs climatiques, estiment les experts consultés par Le Devoir.

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