La tournée des fermes des camionnettes du Marché latino’s dans l’oeil de Valérian Mazataud

Le Colombien d’origine Oscar Correa a fondé le Marché latino’s en 2010. Chaque jour, ses deux camionnettes remplies de produits alimentaires d’Amérique latine quittent l’entrepôt de l’entreprise, à Joliette, pour effectuer la tournée des fermes de la région de Lanaudière, qui emploient des travailleurs agricoles saisonniers originaires majoritairement du Guatemala et du Mexique.

1 Plus de 30 000 travailleurs étrangers temporaires sont employés par des exploitations agricoles du Québec, soit approximativement la moitié de la main-d’oeuvre agricole de la province. La vaste majorité d’entre eux sont originaires du Guatemala et du Mexique. Depuis 2010, le Colombien d’origine Oscar Correa effectue la tournée des fermes de la région de Lanaudière avec deux camionnettes remplies de produits alimentaires d’Amérique latine : tortillas, fromages, croustilles, haricots ou sauce piquante. De quoi mettre un peu de baume au coeur de ces travailleurs qui passent la majorité de l’année loin de chez eux. Valérian Mazataud Le Devoir
2 Oscar Correa et son employé Alonso Salazar achèvent de charger une camionnette avant la tournée quotidienne. Son grand entrepôt de Joliette lui permet de stationner deux ou trois véhicules, ainsi que de hautes étagères remplies de farine, conserves, boissons gazeuses, vêtements, sauces piquantes, etc. « J’ai commencé dans le sous-sol de ma maison, puis dans mon garage, puis j’ai eu accès à un petit entrepôt de 10 x 10, puis à un entrepôt avec une porte il y a quatre ans, avant d’emménager ici l’an passé », explique M. Correa. Valérian Mazataud Le Devoir
3 À chaque nouveau logement de travailleurs, Oscar Correa recommence sa routine d’installation : cogner à la porte pour prévenir les occupants, ouvrir grand les portes de la camionnette, puis sortir quelques boîtes pour installer un petit marché temporaire. Après presque 15 ans à sillonner la région de Lanaudière, le commerçant connaît la majorité des travailleurs, qu’il salue toutes les semaines. Valérian Mazataud Le Devoir
4 Oscar Correa et son employé René Mejia, tous deux originaires de Colombie. Arrivé au Québec en 2005, Oscar Correa a d’abord lavé des voitures à Montréal. C’est en 2010 qu’il a commencé à vendre des cartes d’appel prépayées aux travailleurs saisonniers qui vivaient près de son village de Saint-Alphonse-Rodriguez. De fil en aiguille, il a accumulé des contacts avec les travailleurs des fermes des alentours et il emploie aujourd’hui trois personnes. Valérian Mazataud Le Devoir
5 Chaque soir, les deux camionnettes du Marché latino’s visitent chacune jusqu’à vingt fermes dans Lanaudière. Au total, plus de 200 exploitations agricoles sont visitées par le commerçant. Beaucoup de travailleurs ne disposent pas de transport pour faire leur épicerie. Le jeudi, jour de paye des travailleurs, l’entrepôt est ouvert aux clients. Valérian Mazataud Le Devoir
6 À gauche, Joël, originaire du Mexique. L’homme travaille au Canada depuis 2001, aussi bien en Ontario, en Colombie-Britannique qu’au Québec. Le dimanche est son seul jour de congé et son unique occasion pour se rendre à l’épicerie. À droite, Erikson Melendez, originaire du Guatemala, attend la visite d’Oscar tous les 15 jours. Il est le seul travailleur étranger de cette petite ferme, pour sa deuxième année au Québec. « L’entreprise me fournit un véhicule pour aller au Super C ou au Maxi, mais ces produits-là [du Marché latino’s], on ne les trouve pas au Maxi, ils sont plus typiques du Guatemala. » Valérian Mazataud Le Devoir
7 La camionnette du Marché latino’s se stationne devant un logement de travailleurs dans la région de Sainte-Mélanie. Lorsqu’une exploitation agricole québécoise embauche des travailleurs agricoles de l’étranger, elle leur fournit un logement qui doit correspondre à des critères minimaux : une toilette et une douche pour dix, une cuisine pour six… En juin dernier, le gouvernement du Québec promettait une réforme visant à rehausser les normes de logement au niveau de celui des autres industries, telles que les camps forestiers par exemple. Valérian Mazataud Le Devoir
8 À̀ gauche, les achats d’un travailleur mexicain : la crème fraîche mexicaine à la saveur inimitable, un paquet de Maseca, la farine utilisée pour faire des tortillas, et une boîte de sardines. La Maseca, difficile à trouver dans les supermarchés en région, est le produit le plus vendu par Oscar Correa. À droite, un employé du Marché latino’s prépare la commande d’un travailleur : un paquet de lessive, trois de tortillas et une conserve de haricots rouges en purée. Valérian Mazataud Le Devoir
9 Dans le bureau adjacent à son entrepôt de Joliette, Oscar Correa se charge des envois d’argent chez Western Union pour les travailleurs agricoles saisonniers. Ces envois d’argent de l’étranger, les « remessas », sont essentiels pour les familles restées au pays et contribuent même grandement à l’économie de certaines régions d’Amérique latine. Les travailleurs lui demandent aussi des forfaits de cellulaire ou d’autres services : « S’ils ont besoin d’un jambon au complet par exemple, je peux leur en procurer ! » Valérian Mazataud Le Devoir
10 Ancien banquier en Colombie, Oscar Correa gère précisément tous les aspects de son commerce et essaye de garder des prix abordables. Même si beaucoup payent en argent liquide, il offre désormais la possibilité de payer par carte et accorde des lignes de crédit à ceux qui en ont besoin. Valérian Mazataud Le Devoir
11 Emanuel et Kauzy Lara sont originaires de Guadalajara au Mexique, mais vivent désormais à Sainte-Mélanie, dans Lanaudière. Comme ses parents avant lui, Emanuel Lara travaille comme pasteur missionnaire auprès des Attikameks de Manawan et de Joliette. À quelques jours de la fête des Pères, le camion d’Oscar Correa était attendu avec impatience : mole (sauce de cacao), soupe, fromage frais, fleurs d’hibiscus, boissons gazeuses, sauce piquante, biscuits… « Le pain sent comme au pays ! s’enthousiasme Emanuel Lara. La plupart de ces produits sont introuvables ici, et à Montréal ils valent plus cher ! » Valérian Mazataud Le Devoir
12 Un travailleur repart les bras chargés de croustilles, de tortillas et de boissons gazeuses. « Pour moi, ça n’est pas juste un travail, explique Oscar Correa, c’est un service social. J’essaye de leur apporter un peu de leur terre d’origine pour qu’ils se sentent moins seuls alors qu’ils passent six ou sept mois loin de chez eux. » Valérian Mazataud Le Devoir
13 À la nuit tombante, Oscar Correa ajoute une nouvelle ferme à son itinéraire du mardi. Ce sont les clients d’une autre ferme qui viennent de lui signaler son existence. Les travailleurs sont curieux de découvrir les produits et l’un d’eux fait même l’acquisition d’un haut-parleur Bluetooth. Valérian Mazataud Le Devoir
14 Il est presque 22 h et la camionnette effectue un dernier arrêt à Saint-Esprit avant de rentrer à Joliette. Au coeur de l’été, il n’est pas rare que les travailleurs terminent à 22 h ou 23 h, ce qui ne leur laisse aucun temps libre. « Moi, je leur vends les produits dont ils ont besoin au même prix qu’au Super C, et je leur apporte chez eux », conclut Oscar Correa. Valérian Mazataud Le Devoir

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