Les Premières Nations devraient être actionnaires d’Hydro-Québec, selon l’APNQL

Le chef de l’Assemblée des Premières nations du Québec et du Labrador, Ghislain Picard
Photo: Jacques Boissinot archives La Presse canadienne Le chef de l’Assemblée des Premières nations du Québec et du Labrador, Ghislain Picard

Les Premières Nations devraient avoir la possibilité d’être actionnaires d’Hydro-Québec et de conclure des ententes avec la société d’État sans l’accord de Québec, a fait valoir jeudi l’Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador (APNQL).

« Il y a d’autres provinces qui le font [avoir des actionnaires autochtones]. Je pense qu’en 2024, ce serait juste normal qu’on nous fasse une place dans cette grande société », a lancé le chef de la communauté de Mashteuiatsh, Gilbert Dominique, en marge des consultations sur le projet de loi 69 sur l’énergie.

Hydro-Québec a un seul actionnaire : le gouvernement du Québec. Or, l’APQNL juge que les Premières Nations « doivent avoir la possibilité d’être actionnaires d’Hydro-Québec afin d’obtenir une part juste et équitable des dividendes et des retombées de l’exploitation de leurs territoires ».

En commission parlementaire, l’APNQL a reproché au gouvernement de ne pas avoir impliqué les Premières Nations dans la préparation de sa réforme sur l’énergie.

« Le monde autour de nous évolue. Mais on semble avoir stagné ici », a lancé le chef de l’Assemblée, Ghislain Picard. Il a dit avoir constaté un changement d’approche chez Hydro-Québec, mais pas au gouvernement.

Pourtant, « le succès de [la] transition énergétique » du Québec passe par l’accès au territoire, a rappelé le chef Dominique. Sans la mise en place d’une « relation adéquate » avec les Premières Nations, il a deux mots à lancer au gouvernement : « Bonne chance ».

« S’il y a du développement qui se fait à l’encontre de nos droits, s’il y a du développement qui se fait dans des zones où, pour nous, c’est inacceptable, je pense que les Premières Nations vont assurément faire en sorte que ça ne se passe pas », a-t-il ajouté.

L’APNQL a par ailleurs demandé à Hydro-Québec de fixer, pour ses projets, des cibles minimales d’approvisionnement auprès des entreprises des Premières Nations. Ces contrats pourraient servir de « leviers » à des entreprises, qui pourraient ensuite « faire leur niche dans le marché régulier », a résumé le chef Dominique.

L’association s’est aussi inquiétée d’une disposition du projet de loi 69, qui vise à permettre la distribution privée d’électricité à un client situé sur un « terrain adjacent » d’un site de production, sous certaines conditions. Cette proposition « ouvre la porte à un approvisionnement direct des industriels auprès de producteurs privés », a fait valoir l’organisation.

De l’exploitation, des compensations

L’APNQL a par ailleurs avancé que les Premières Nations devaient être compensées « pour les pertes et les dommages passés et actuels en lien avec l’exploitation du territoire et le développement énergétique ». La société d’État « tient sa réussite de l’exploitation des ressources qui se trouvent sur les territoires sur lesquels les Premières Nations détiennent des droits », a rappelé l’organisation.

Hydro-Québec a récemment signé à Unamen Shipu (La Romaine) une entente de 32 millions sur 23 ans pour « régler » le délicat dossier de la centrale hydroélectrique du Lac-Robertson, construite en 1995 sur le territoire des Innus, sans leur accord. La société d’État et le gouvernement ont aussi allongé 45 millions de dollars sur six ans pour ouvrir les négociations avec la communauté de Pessamit, où Hydro-Québec a des ambitions dans l’éolien.

L’APNQL juge par ailleurs que les Premières Nations « doivent [être] représentées significativement sur le conseil d’administration ainsi que dans les postes de direction d’Hydro-Québec ». Dans une réponse transmise au Devoir jeudi, la société d’État a écrit qu’il n’y a aucun membre des Premières Nations parmi les quatorze personnes siégeant à son conseil d’administration. L’ex-patronne d’Hydro-Québec, Sophie Brochu, avait formulé dès 2021 le souhait de voir des Autochtones au conseil.

Hydro-Québec comptait en février 368 employés autochtones, et la très grande majorité de ces personnes occupaient des emplois désignés par la société d’État comme des « métiers ».

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