Un pas de plus vers la fin de la vente des voitures à essence au Québec

Le gouvernement Legault vient de franchir une nouvelle étape en vue de l’interdiction de la vente de voitures à essence au Québec, avec le dépôt d’un projet de règlement pour la fin de la mise en marché de tels véhicules à partir de 2035. Mais le gouvernement prévoit aussi une « évaluation de la maturité du marché » avant cette date, évoquant au passage « d’éventuels ajustements ».
Le projet de règlement visant « à interdire la vente de véhicules à combustion légers neufs à partir de 2035 » a été publié mercredi. Il prévoit que les « véhicules légers à combustion neufs » de l’année modèle 2034 et des précédentes ne pourront plus être vendus ou loués au Québec à partir du 1er janvier 2035. En ce qui a trait aux véhicules de l’année modèle 2035 et les suivantes, il sera interdit de les vendre ou de les louer au Québec, « qu’ils soient neufs ou usagés ».
Selon ce que précise le communiqué gouvernemental, « il est prévu qu’une évaluation de la maturité du marché soit effectuée par le gouvernement vers 2030, afin de permettre d’éventuels ajustements, pour garantir une transition réussie en 2035 ».
Au moment de déposer le projet de loi dont découle le projet de règlement, le gouvernement Legault avait rejeté l’idée de devancer la fin de la vente de véhicules à 2030, jugeant qu’à cette date, il n’y aurait pas suffisamment de véhicules neufs électriques pour approvisionner le marché québécois.
Pour le moment, le secteur du transport routier pèse lourd dans le bilan des émissions de gaz à effet de serre du Québec, avec plus de 24 millions de tonnes. Sa part sur les émissions totales du Québec est passée de 24,5 % en 1990 à 31,2 % en 2021, soit le plus récent bilan disponible. De 1990 à 2021, les émissions du transport routier ont connu une augmentation de 16 %.
Véhicules imposants
En mars 2024, le Québec comptait près de 270 000 véhicules légers entièrement électriques ou hybrides rechargeables, sur les quelque 4,8 millions de véhicules sur les routes de la province. La cible établie dans le Plan pour une économie verte 2030 est de 2 millions de véhicules électriques sur les routes d’ici 2030. Au premier trimestre de 2024, les véhicules électriques représentaient 22,1 % des nouveaux véhicules légers.
Une part importante de ces ventes se trouve dans la catégorie des camions légers (véhicules utilitaires sport, pick-ups et camionnettes). Cette tendance lourde est d’ailleurs de mauvais augure, selon ce que faisait valoir Pierre-Olivier Pineau, titulaire de la Chaire de gestion du secteur de l’énergie de HEC Montréal, au moment de la publication de la 10e édition de l’État de l’énergie au Québec.
Non seulement les véhicules plus imposants consomment plus d’énergie que les voitures, mais, surtout, ils nécessitent plus de ressources pour leur construction, en plus d’influencer l’occupation du territoire.
« Avec des camions légers électriques, l’attachement des individus au véhicule croît. Ce n’est pas un simple moyen de transport, mais un style de vie et une image de soi-même. On ancre encore plus le paradigme de l’auto dans nos styles de vie et on s’éloigne d’un chemin possible vers la carboneutralité », faisait valoir M. Pineau.
« Si nous restons dans un paradigme du véhicule individuel, même électrique, nous n’allons pas inverser la tendance à l’étalement humain qui morcelle le territoire, appauvrit les écosystèmes et demande énormément de ressources [béton, acier et autres matériaux] pour être développé », ajoutait l’expert.
Le ministre de l’Environnement du Québec, Benoit Charette, n’entend toutefois pas agir pour inverser cette tendance à acquérir des véhicules plus gros et plus énergivores. Il mise plutôt sur l’électrification de ces véhicules.