Il n’y a pas d’«inondation» de demandes anticipées d’aide médicale à mourir, note Québec

L’« inondation » de demandes anticipées d’aide médicale à mourir (AMM) que certains groupes attendaient pour l’automne n’a pas eu lieu, soutient la ministre déléguée à la Santé, Sonia Bélanger, selon qui l’acceptabilité sociale envers la mouture actuelle de la Loi concernant les soins de fin de vie est « indéniable ».
Un peu plus de 10 ans après les balbutiements du programme d’aide médicale à mourir au Québec, le gouvernement Legault croit avoir trouvé un équilibre — au moins temporaire — dans la version actuelle de sa loi. Et ce, même si 6,2 % des décès au Québec en 2022 sont survenus par AMM, un chiffre plus élevé qu’ailleurs au Canada, qu’aux Pays-Bas et qu’en Belgique, selon le Rapport 2018-2023 sur la situation des soins de fin de vie au Québec.
Aux dernières nouvelles, une centaine de personnes avaient effectué une requête anticipée d’AMM, pratique rendue possible le 30 octobre dernier dans le réseau de la santé, a soutenu mardi la ministre Bélanger. C’est bien moins que ce que le discours public avait laissé entendre, a-t-elle dit après avoir déposé en Chambre deux rapports quinquennaux sur les soins de fin de vie.
« Plusieurs groupes disaient : “Vous allez être inondés de demandes. Les médecins ne seront pas capables de répondre à tout ça.” », a souligné Mme Bélanger, mardi. « Honnêtement, ce n’est pas ça qui se passe. »
L’AMM élargie
En 2023, le gouvernement avait élargi, par le truchement d’un projet de loi, une bonne partie de l’offre québécoise de soins de fin de vie. Les personnes touchées par une « déficience physique grave entraînant des incapacités significatives et persistantes » sont donc désormais admissibles à de tels soins.
Les demandes anticipées sont rendues possibles, elles, par une directive envoyée aux procureurs par le ministre Simon Jolin-Barrette l’an dernier : aucun médecin ou infirmière spécialisée répondant positivement à une telle requête ne sera poursuivi, malgré l’illégalité de la chose aux yeux du Code criminel canadien.
Il est impossible pour l’instant de savoir quel impact ces ajouts à l’offre de soins de fin de vie auront sur les statistiques d’aide médicale à mourir, convient la ministre Bélanger. L’élue constate cependant l’apparition d’un « plateau » dans les dernières années.
De 2016 à 2022, le nombre d’AMM « administrées » au Québec a augmenté chaque année de 47,5 % en moyenne, indique le Rapport 2019-2024 sur l’application de la Loi concernant les soins de fin de vie, un autre document déposé par Mme Bélanger, mardi. Selon ce même rapport, l’augmentation n’a été que de 17 % entre 2022 et 2023.
« On voit une stabilisation », a souligné Mme Bélanger, citant également des statistiques granulaires de l’année 2024.
En outre, « sur les 20 000 et plus AMM qu’il y a eu au Québec, il n’y a jamais eu de cas frivole », a observé mardi le président sortant de la Commission sur les soins de fin de vie, le Dr Michel Bureau. « La loi a été bien faite pour éviter qu’il y ait [des] dérapages. »
En permettant aux infirmières praticiennes spécialisées d’administrer comme les médecins l’AMM et en obligeant les maisons de soins palliatifs à offrir cette option, la ministre Bélanger espère éviter que toute personne nécessitant des soins de fin de vie en soit privée.
Dans sa forme actuelle, elle qualifie la Loi concernant les soins de fin de vie de « complète ». « L’acceptabilité sociale […] est indéniable », a-t-elle affirmé. Élargir l’accès à l’AMM aux personnes touchées par des troubles mentaux, une idée qu’Ottawa a adoptée avant de repousser son entrée en vigueur à au moins 2027, n’est pas dans les cartons. « Il n’y a pas de consensus, même pas scientifique », a ajouté l’élue.