Des mangues et des noix pour l’autonomie des femmes et des jeunes en Haïti
Collaboration spéciale

Ce texte fait partie du cahier spécial Coopération internationale
L’organisme Solidarité Union Coopération (SUCO) vient de clôturer le projet PROFI, conçu pour vitaliser le développement des filières cajou, mangue et maraîchère au bénéfice des femmes et des jeunes dans le département du Sud d’Haïti. Julie Potvin-Lajoie, chargée de projets internationaux chez SUCO, en trace le bilan.
Basée à Montréal depuis 1961, l’organisation SUCO œuvre à rassembler des ressources de toutes natures « dans le but de renforcer l’autonomie des personnes, des organisations et des collectivités », dépeint Julie Potvin-Lajoie, et d’améliorer les conditions de vie sociales, économiques et environnementales des territoires ciblés. L’organisme est ainsi actif dans dix pays, en Afrique de l’Ouest, en Amérique centrale et du Sud, ainsi qu’en Haïti et au Canada.
L’initiative PROFI Femmes et Jeunes, déployée en Haïti, conjugue trois des champs d’expertise de SUCO : les droits et la participation des femmes, la résilience aux changements climatiques et les systèmes alimentaires viables. En valorisant, depuis 2020, le rendement productif et nutritionnel des filières mangue, noix de cajou et production maraîchère, les artisans de PROFI ont contribué à solidifier le sort de familles « dont la sécurité alimentaire est fortement compromise et affectée par des aléas climatiques, qui se manifestent énormément en Haïti, et de plus en plus avec le contexte mondial », explique Mme Potvin-Lajoie.
Concrètement, l’organisme a concentré ses actions sur trois volets : la production à travers les vergers et le maraîchage, la transformation des produits alimentaires récoltés dans le but de les commercialiser, ainsi que la création et l’appui à des entreprises existantes.
Savoir local
L’un des principaux fers de lance des activités de PROFI, fait valoir la chargée de projets, repose sur le partenariat et l’alliance avec des organisations locales, « qui sont souvent les mieux placées pour mettre en œuvre des solutions durables à l’amélioration des conditions de vie ». L’apport de SUCO vient en quelque sorte appuyer les expertises locales embauchées sur le terrain.
« Nous, on accompagne, on met en œuvre, on mise sur le renforcement des capacités. On réunit des conditions gagnantes, financièrement, par exemple. Tout se fait de manière concertée. SUCO agit comme un levier dans cette coopération. Depuis des décennies, l’organisme a toujours valorisé le savoir local. On ne veut ni imposer ni dicter des façons de faire, mais plutôt bonifier l’existant et améliorer des pratiques. »
PROFI-Femmes et Jeunes se concentre essentiellement sur ces deux tranches de la population, d’abord pour redorer la perspective de l’agriculture aux yeux des jeunes, puis pour faciliter l’accès des femmes à des marchés traditionnellement masculins, dans un souci d’inclusion.
« Les jeunes s’exilent beaucoup vers la capitale et ne perçoivent pas l’agriculture comme une source de revenus fiable. On voulait présenter l’agriculture comme une activité sûre et génératrice de revenus, dans laquelle on peut s’investir. Et on voulait voir de quelle façon on pouvait mieux intégrer les femmes à toute la chaîne de production. » Parce que ces dernières ont peu accès aux prêts par les institutions financières ou les coopératives dans le pays, l’organisation a notamment octroyé du financement à des initiatives entrepreneuriales principalement dirigées et menées par des femmes.
Quant au choix de la mangue et de la noix de cajou comme matières à développer par PROFI — plutôt que le café ou le chocolat, par exemple —, il s’est effectué au terme d’analyses rigoureuses. « La mangue et la noix de cajou se produisent en Haïti, bien entendu, mais ont aussi une grande place dans l’alimentation et la culture. On y voyait aussi un potentiel, en s’appuyant sur les études, au niveau de la transformation alimentaire. Cette production de fruits, sa transformation et sa commercialisation peuvent représenter un revenu pour un individu et un noyau familial. »
Réalisations
Contractuellement parlant, le mouvement PROFI s’étire jusqu’en 2025, mais ses activités se sont conclues en décembre. À l’heure de faire le bilan, Julie Potvin-Lajoie estime que les réalisations ont été nombreuses.
« Ça s’est traduit en agroécologie et en accompagnement technique pour l’amélioration des pratiques de production, de cueillette, de greffage, de post-récolte, de transformation alimentaire et de commercialisation. On a réhabilité des vergers et reboisé des hectares. On a développé et commercialisé deux gammes de produits alimentaires à base de noix et de mangue. On a distribué des équipements aux personnes participant au projet et octroyé 60 subventions à des initiatives entrepreneuriales locales. »
De tous les plans d’affaires soumis dans le cadre de PROFI, certains impliquaient même la production de crème glacée, l’apiculture et les médicaments vétérinaires. Des pépinières et des banques de semences ont été implantées, des centres de transformation de fruits ont été rénovés et du matériel vulgarisant les techniques et les pratiques agricoles améliorées a été distribué, toujours dans une volonté de durabilité et d’autonomisation des populations.
Pour l’instant, aucune reconduction du programme n’est prévue. Sa clôture a été soulignée en présence des populations locales, « pour reconnaître le rôle joué par ces dernières », soutient Mme Potvin-Lajoie.
« En ce moment, on est en mode récolte de données, documentation d’initiatives et de la démarche, pour bien intégrer les leçons apprises et les bonnes pratiques de l’intervention PROFI dans les dernières années, dans le but de mieux réfléchir à de futurs projets », conclut-elle, spécifiant que des réflexions et des explorations seront ensuite menées afin d’identifier de nouvelles pistes d’initiatives, destinées à Haïti ou à d’autres pays.
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