Lire et relire Claude Ryan pour un éclairage toujours actuel

Tout au long de sa vie active, Claude Ryan a beaucoup écrit sur la société québécoise. Plusieurs de ses textes, par leur perspective unique, jettent un éclairage particulier sur les enjeux d’aujourd’hui.
Cet aspect de son œuvre mérite d’être souligné à l’occasion du 100e anniversaire de sa naissance, le 26 janvier 1925. Les sujets ne manquent pas. Je me limiterai ici à aborder brièvement certains aspects de la question identitaire qu’il aurait jugés plus fondamentaux.
Ses contributions à la paix linguistique, à la transformation du système scolaire confessionnel en réseaux linguistiques et au maintien du fédéralisme l’ont amené à juger inévitable que resurgisse périodiquement, sous une forme ou une autre, le débat identitaire. En effet, il était convaincu que le courant bleu, dont les tenants accordent préséance aux droits collectifs destinés à préserver le fait français, est profondément ancré dans la culture québécoise.
Il aurait toutefois déploré le retour du travers qu’il appelait « confessionnalisme linguistique », qui consiste à reconnaître du bout des lèvres la place de la communauté anglophone, d’une part, et, dans la pratique, à adopter des mesures visant à créer un espace uniquement francophone, sans égard à la diversité contemporaine de la société québécoise, d’autre part.
Il se serait inquiété du prolongement de ce travers dans les politiques d’immigration. Il défendait l’idée que l’adhésion des nouveaux arrivants et de leurs descendants à la langue française et aux valeurs québécoises ne pouvait se faire de façon durable qu’avec le cœur et non à coups d’admonestations, d’oukases ou de promesses non tenues.
L’étiolement intellectuel du courant rouge sur ces sujets l’aurait inquiété. L’adoption de prises de position s’appuyant sur une conception désincarnée et abstraite de la primauté des droits individuels l’aurait amené à juger que les libéraux redevenaient « tone-deaf » aux sensibilités identitaires légitimes de la majorité francophone. Dans ce contexte, il aurait été attristé, mais non surpris, de voir la population se détacher du Parti libéral du Québec (PLQ) et plonger celui-ci dans l’ombre d’une longue éclipse.
Profondément libéral et optimiste, il aurait vraisemblablement cru que les rouges, s’ils s’attellent à la tâche avec rigueur, peuvent redéfinir une position plus juste, plus équilibrée, qui redonne confiance à nos concitoyens.
Dans la même veine, il aurait été dubitatif devant plusieurs interventions brouillonnes de la part de responsables politiques sur la place de la religion dans l’espace public, s’inspirant tantôt d’un relativisme malsain ou d’une forme pernicieuse d’intégrisme laïque et des divisions larvées qu’elles entretiennent.
Sur ces questions, comme sur d’autres, les textes de Claude Ryan peuvent encore éclairer.
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