Lire «Le Devoir» dans ses cours de francisation

Les enseignants de francisation d’Afiqah Yusuf lui ont suggéré de lire «Le Devoir» pour en apprendre plus sur le Québec. «C’est un journal spécial, parce qu’il approfondit les sujets d’immigration», juge-t-elle.
Photo: Valérian Mazataud Le Devoir Les enseignants de francisation d’Afiqah Yusuf lui ont suggéré de lire «Le Devoir» pour en apprendre plus sur le Québec. «C’est un journal spécial, parce qu’il approfondit les sujets d’immigration», juge-t-elle.

Afiqah Yusuf est une nouvelle lectrice du Devoir, elle a commencé à lire le quotidien en même temps qu’elle a commencé ses cours de francisation, au début de l’année 2024.

« C’est ma première entrevue en français », lance d’emblée Afiqah Yusuf, assise dans un café d’Outremont, quartier où elle habite depuis quelques années. Malgré son entourage anglophone et son travail, où elle n’utilise que l’anglais, elle a décidé l’an dernier de s’inscrire à des cours de francisation. C’est la recherche de réponses à la question « Qu’est-ce que c’est d’être Québécois ? » qui l’a poussée à tenter l’expérience, 14 ans après avoir emménagé à Montréal. « C’est important de parler français pour se sentir proche du Québec, je crois. Avant, je sentais qu’il y avait une séparation », exprime-t-elle dans un français presque irréprochable. « Pour pouvoir parler avec ma voisine aussi », continue-t-elle avec un sourire.

Avant de commencer ses cours, elle avait appris quelques mots de base en français, mais ne se considérait pas du tout comme bilingue. Son quotidien se déroulait entièrement en anglais et toutes ses sources d’information étaient anglophones. « C’est difficile de commencer, je n’avais pas d’entourage avec qui parler », explique-t-elle. Grâce à ses cours, elle s’est développé un cercle avec qui elle ne parle « que français ».

Dans ses cours, on lui a suggéré de lire les journaux francophones, certes pour s’entraîner à lire en français, mais aussi pour mieux saisir certaines décisions politiques qui l’affectent. Conseil qu’elle a suivi, en commençant à intégrer la lecture de La Presse et du Devoir dans son quotidien. Quelques mois plus tard, elle signait une première lettre d’opinion dans un journal, chose qu’elle assure qu’elle n’aurait pas été capable de faire avant d’avoir commencé ses cours. « J’ai écrit une deuxième lettre dans Le Devoir un peu plus tard. Je voulais continuer de contribuer au débat. » Dans les deux cas, ses publications portaient sur l’avenir des cours de francisation au Québec, un passage qui n’est « pas optionnel » dans l’intégration d’une personne immigrante qui ne parle pas français, estime-t-elle désormais. Grâce à ses cours de francisation, « j’apprends mieux le Québec », explique celle qui y vit depuis plus de dix ans.

Depuis le début de sa démarche, elle s’informe régulièrement en français. Au travers des articles d’Isabelle Porter, elle a appris « l’histoire de la francisation au Québec », qu’elle décrit comme une suite d’événements « compliqués » que ses collègues de classe qui ne lisent pas les nouvelles ne comprennent pas. L’annonce de la fin de l’incitatif pour les cours de francisation à temps partiel en septembre dernier l’a profondément bouleversée. « C’est un désastre », dit-elle. À travers sa lecture des journaux francophones, elle a développé une meilleure compréhension de la situation.

« Le Devoir, c’est un journal spécial, parce qu’il approfondit les sujets d’immigration », juge l’ancienne chercheuse postdoctorale à McGill. En plus de se sentir plus proche du Québec en apprenant la langue officielle, elle comprend mieux les « valeurs fondamentales » de la province à travers ses cours et sa lecture hebdomadaire du journal.

Elle considère que c’est cet approfondissement qui fait la richesse du journal et qui la garde intéressée à son contenu. Pour elle, il est important et primordial de continuer à souligner l’importance de la langue française. Elle continuera d’ailleurs ses cours de francisation jusqu’au « niveau 8 », le « plus haut ». « Je suis chanceuse, parce que j’ai commencé avant les coupes. Maintenant, chaque session, il y a des [enseignants] qui partent parce que l’école doit fermer des classes. » Un « non-sens », selon elle, qui juge qu’« il faut ouvrir la porte du Québec à ceux qui veulent s’intégrer ».

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