«Les lieux de pouvoir au Québec»: pour la petite histoire

Dave Noël et Marco Bélair-Cirino au Salon bleu de l'Assemblée nationale
Photo: Savoir média Dave Noël et Marco Bélair-Cirino au Salon bleu de l'Assemblée nationale

Il s’agit de se rendre dans « des endroits méconnus où même les journalistes parlementaires ne peuvent pas aller », explique le chef de la division politique du Devoir, Marco Bélair-Cirino, à propos de la série documentaire qu’il coanime avec son collègue Dave Noël. Les lieux de pouvoir au Québec est le troisième volet d’un projet entamé à l’été 2016 sous la forme d’une série d’articles, puis décliné en livre en 2019, qui se concentre cette fois en images sur ces adresses emblématiques — et leur lot d’anecdotes — qui ont marqué la vie politique de la Révolution tranquille à nos jours. « On va des bureaux des députés, avec eux évidemment, jusqu’au grenier du parlement », prévient-il. Suivez le guide.

Cette aventure qui dure depuis près de dix ans a permis à Marco Bélair-Cirino et à Dave Noël d’être les témoins privilégiés du temps qui passe et, par conséquent, des multiples changements de décor qui ont eu lieu, expérience qu’ils peuvent désormais partager avec les téléspectateurs. C’est notamment le cas avec le Salon bleu de l’Assemblée nationale, que les deux journalistes connaissent bien et qu’ils ont pu filmer avant sa cure de jouvence.

Photo: Savoir média L'édifice J, surnommé le bunker

« Ils sont en train de refaire le plancher, d’enfouir le filage, etc., donc, on l’a vu de justesse », précise Dave Noël. Toutefois, même si ces lieux de pouvoir sont importants, ou l’ont un jour été, leur préservation n’est pas toujours garantie. C’est le cas, par exemple, pour l’iconique terrasse que Robert Bourassa avait installée sur l’édifice Jean-Talon de la Grande Allée à Québec, communément appelé le « bunker » ou le « calorifère », où trônaient une table en plastique blanc et quelques chaises. « Bourassa recevait tout le monde sur cette terrasse-là, tout comme Lucien Bouchard ou Mario Dumont, dans des moments vraiment marquants, surtout au début des années 1990. Mais des travaux d’aménagement ont fait disparaître l’espèce de trottoir de bois que nous, on a vu à l’époque », ajoute-t-il, frappé par la vitesse à laquelle les choses peuvent changer. De fait, la série documentaire établit « un contact avec le passé », indique Marco Bélair-Cirino.

En toute discrétion

Les lieux de pouvoir au Québec est aussi l’occasion d’aller à la rencontre de personnes clés qui évoquent leurs souvenirs. « Ça rend ces lieux-là encore plus intéressants aujourd’hui, quand on sait que toutes ces histoires s’y sont déroulées », souligne Marco Bélair-Cirino. Il fait entre autres référence au tunnel double qui relie l’hôtel du Parlement au « bunker » pour permettre au premier ministre et à sa garde rapprochée de passer d’un édifice à l’autre à l’abri des regards. « Jean-François Lisée nous a raconté que plusieurs discussions avaient eu lieu dans ce corridor-là. Parce que tout le monde se bat pour avoir l’attention du premier ministre, donc, si tu as son attention, tu es dans un lieu de pouvoir à ce moment-là », mentionne-t-il.

Photo: Savoir média Marco Bélair-Cirino et Dave Noël rencontrent le premier ministre François Legault dans son bureau de l’Assemblée nationale.

Le « bunker », justement, est un lieu qui pique autant la curiosité du duo d’animateurs que celle des télespectateurs, tant le bâtiment impressionne par son architecture brutaliste. « J’ai eu un coup de cœur pour l’ancienne salle du Conseil des ministres : certains ont l’impression qu’ils se retrouvent dans la centrale du docteur Folamour ou dans un épisode de la série Star Trek », souffle Marco Bélair-Cirino. Il avoue par ailleurs être fasciné par la table en forme de cercle où, sous René Lévesque, les ministres prenaient place par ordre alphabétique. « Pauline Marois raconte bien que ce n’était pas par ordre de séniorité ou d’importance de la fonction. » Et Dave Noël de renchérir : « Il faut aussi imaginer la fumée dans la salle de la soucoupe volante. Ça devait être épouvantable. » Il fut un temps, il est vrai, où la cigarette était permise, voire encouragée, jusqu’au sommet de l’État.

Dave Noël salue en outre le charme discret du lac à l’Épaule, à l’origine de la fameuse expression « un lac-à-l’épaule ». « Beaucoup de gens ignorent qu’il existe réellement un lac à l’Épaule, où se sont déroulés des moments importants », indique-t-il. C’est en effet au lac à l’Épaule que Churchill et Roosevelt ont pu se reposer en pleine Deuxième Guerre mondiale. « La nationalisation de l’électricité, c’est quand même un tournant dans l’histoire du Québec moderne, et ça s’est joué là-bas. Donc, Lévesque était très attaché au lac. Il se baignait dedans, carrément », poursuit le journaliste. On apprend également que celui-ci est désormais fréquenté en grande partie par des pêcheurs, mais qu’il est tout à fait possible de louer le chalet qui a marqué à maintes reprises l’Histoire.

Photo: Savoir média Un camp de pêche au fameux lac à l'Épaule, où, apprend-on dans la série «Les lieux de pouvoir au Québec», Churchill et Roosevelt ont pu se reposer en pleine Deuxième Guerre mondiale.

« L’intérêt pour nous, en tout cas, c’était de voir l’évolution des lieux par rapport au premier ministre en place aussi », conclut Dave Noël. Ainsi, François Legault a permis à l’équipe des Lieux de pouvoir au Québec de pénétrer dans son bureau, où il affiche fièrement au mur un chandail de Guy Lafleur. « C’est passionnant de l’entendre sur l’exercice du pouvoir quand il dit : “Le soir, je me demande si j’ai vraiment bien pesé le pour et le contre. Est-ce que la décision que j’ai prise aujourd’hui était la meilleure ?” signale Marco Bélair-Cirino. C’est un accès sans doute inédit pour des journalistes munis de caméras. »

Les lieux de pouvoir au Québec

Savoir média, dès le 17 février


Une version précédente de ce texte, qui laissait entendre que Dave Noël et Marco Bélair-Cirino signent la série documentaire, a été corrigée. C’est Flavie Payette-Renouf qui la signe en tant que réalisatrice, scénariste et productrice au contenu.

À voir en vidéo