Nous, personnes migrantes, avons le droit de vivre avec dignité !

Au cours de l’année 2024, plusieurs annonces en matière d’immigration se sont succédé tant à Ottawa qu’à Québec. Elles visent, quasi exclusivement, la baisse du nombre des personnes migrantes et immigrantes, sans proposer de mesure de protection pour les personnes déjà présentes sur le sol canadien et québécois. Des centaines de milliers de personnes migrantes, avec un statut migratoire précaire, ou sans statut, subissent ainsi un changement des règles sans délai et se sentent abandonnées et dédaignées.
Il y a à peine quatre ans, les mêmes personnes migrantes recevaient des louanges, parce qu’elles travaillaient dans des secteurs « essentiels » pendant la crise de la COVID-19. Ottawa et Québec ont dû faire appel à des travailleurs migrants pendant que la fermeture des frontières et le confinement étaient en vigueur, car la survie de notre société et de notre économie reposait entre leurs mains. Parallèlement, les gouvernements ont accéléré le recrutement des travailleurs étrangers temporaires, d’abord pour combler les pénuries de main-d’œuvre engendrées par la pandémie, lorsque les gouvernements recommandaient à la population canadienne de prioriser le travail à distance, ensuite pour faire face aux besoins de relance économique postpandémique.
Aujourd’hui, les personnes migrantes et immigrantes travaillent toujours dans des secteurs essentiels et servent toujours à combler des pénuries de main-d’œuvre, résultant dorénavant surtout des pénibles conditions de travail insuffisamment rémunérées. Plutôt que de remettre en cause ce modèle économique, notamment en accordant à ces personnes migrantes et immigrantes les mêmes droits ou les mêmes possibilités d’exercer leurs droits au travail et dans la vie quotidienne, les mêmes gouvernements, qui ont encouragé et autorisé les employeurs à recruter à tour de bras des travailleurs et les établissements postsecondaires à faire venir des étudiants internationaux qui paient des droits de scolarité exorbitants, ont changé leurs discours du jour au lendemain.
Depuis la fin de l’été 2023, les personnes migrantes sont montrées du doigt, accusées d’être le principal facteur de la crise du logement et des services publics, alors que ces problèmes sociaux sont le produit des défaillances des politiques publiques.
Avec la mise en œuvre de plusieurs mesures restrictives adoptées cet automne, les travailleurs migrants ont plus de difficulté à renouveler leur permis de travail ou à en obtenir un nouveau. Par exemple, en ne disposant plus que d’une seule année de validité du permis de travail, comme c’est dorénavant le cas du Programme des travailleurs étrangers temporaires pour les postes à bas salaire, il est quasiment impossible d’obtenir un nouveau permis avec un nouvel employeur, car le processus prend généralement plus de six mois.
Les étudiants étrangers arrivés récemment auront beaucoup de difficulté à obtenir leur permis de travail après la fin de leur programme d’études. Les demandeurs d’asile se voient automatiquement privés de leurs permis de travail ou d’études une fois qu’une mesure de renvoi est rendue exécutoire. Pour toutes ces personnes, l’accès à la résidence permanente est encore plus restreint. Par ailleurs, la promesse du gouvernement de Trudeau pour la mise en place d’un programme de régularisation, large et inclusif, est brisée.
Dans l’ensemble, les gouvernements enferment les personnes migrantes dans une précarité accrue et piétinent les projets de vie et les rêves d’avenir de centaines de milliers de personnes.
Demain, le 18 décembre, est la Journée internationale des migrants. Nous, les personnes migrantes, refusons de nous confiner dans le désespoir silencieux. Nous avons le droit de vivre avec dignité et le devoir de réclamer la reconnaissance de notre valeur. C’est pourquoi nous organisons ce 18 décembre plusieurs activités, en déclarant ce jour comme Une journée sans personnes migrantes, car #RienNeBougeSansNous.
Des rassemblements sont prévus dans plusieurs villes canadiennes, dont Montréal, Québec, Rimouski, Chicoutimi, Vancouver, Edmonton, Calgary et Toronto, et plusieurs autres activités seront organisées, en présence et en ligne, pour réclamer la défense des droits des personnes migrantes et exprimer la solidarité. Joignez-vous à nos activités et exprimez votre appui pour la dignité des personnes migrantes et l’égalité des droits de toutes les personnes.
Ce texte fait partie de notre section Opinion, qui favorise une pluralité des voix et des idées en accueillant autant les analyses et commentaires de ses lecteurs que ceux de penseurs et experts d’ici et d’ailleurs. Envie d’y prendre part? Soumettez votre texte à l’adresse opinion@ledevoir.com. Juste envie d’en lire plus? Abonnez-vous à notre Courrier des idées.