Les joyaux comme Tamaracouta, un patrimoine écologique à protéger

«Alors que la préservation de la biodiversité n’a jamais été aussi urgente, que l’accès à la nature a fait ses preuves pour la santé des jeunes (qui en sont de plus en plus privés), Tamaracouta est en péril», déplorent les auteurs.
Photo: Partenaires du Lac Tamaracouta et de ses environs «Alors que la préservation de la biodiversité n’a jamais été aussi urgente, que l’accès à la nature a fait ses preuves pour la santé des jeunes (qui en sont de plus en plus privés), Tamaracouta est en péril», déplorent les auteurs.

La protection des forêts du sud du Québec est un élément essentiel pour faire face à la crise écologique empirée par les changements climatiques, les deux résultant de l’activité humaine. Chez nous, par exemple, le développement résidentiel menace l’habitat du faucon pèlerin et des autres oiseaux de proie qui nichent dans les falaises des Basses-Laurentides. La plus riche biodiversité du Québec se trouve dans les régions du sud, et une occasion en or se présente de mieux la protéger en sauvant un large territoire d’habitat forestier jusqu’ici protégé.

Les arbres demeurent la seule manière peu coûteuse d’extraire des gaz à effet de serre (GES) de l’atmosphère et de les séquestrer. Les milieux naturels sont aussi des éponges face aux pluies diluviennes. Le contact avec la nature est si bénéfique pour les humains que le « bain de forêt » est prescrit par le corps médical au Japon et au Canada. Les bienfaits de la nature sont particulièrement importants pour le développement et l’apprentissage des enfants.

Des bienfaits que plusieurs générations d’enfants ont pu apprécier à la réserve scoute Tamaracouta, le plus vieux camp scout en activité au monde… avant sa fermeture. Cela a été rendu possible grâce à des philanthropes de Montréal qui s’unirent, au début du siècle dernier, afin de lever les fonds nécessaires à la création d’un camp permanent pour les jeunes du Québec. Cette permanence est maintenant remise en question. Depuis la fermeture du camp en 2018 et sa mise en vente subséquente par Scouts Canada en 2022, un incendie criminel a ravagé le bâtiment principal, parmi d’autres actes de vandalisme, et des intrus viennent y faire des feux de camp malgré les interdictions et les feux de forêt qui ravagent le Québec.

Les citoyens locaux et d’anciens scouts se mobilisent bénévolement et ont formé un groupe de vigilance et un organisme de conservation pour protéger à perpétuité ce rare joyau d’écosystème naturel dans les Laurentides, dont seulement 9 % du territoire est protégé — bien loin des 30 % convenus aux termes de l’accord sur la biodiversité conclu à Montréal même.

La conservation du site et son accès au public, particulièrement pour les enfants en manque de nature, devraient aller de soi. C’était la visée même des gens qui ont mis le projet en branle en 1912, qui est encore plus pertinent et urgent en 2024. C’est « win, win, win » pour la santé physique, la santé mentale et la préservation des écosystèmes qui maintiennent la vie sur Terre.

Alors que la préservation de la biodiversité n’a jamais été aussi urgente, que l’accès à la nature a fait ses preuves pour la santé des jeunes (qui en sont de plus en plus privés), Tamaracouta est en péril.

Les pertes d’espaces écologiquement intacts sont particulièrement importantes dans le sud du pays, où les terres deviennent de plus en plus rares et coûteuses, sous les pressions exercées par la construction immobilière.

Peut-on aussi craindre de voir se reproduire le scénario qui se déploie à plusieurs endroits au sud de la frontière ? Des groupes de conservation locaux et des nations autochtones réclamant leurs terres volées doivent concurrencer les pressions du marché pour protéger les nombreux terrains que Scouting America a liquidés après des années de scandales et d’actions collectives historiques pour abus sexuels et faillite. Scouts Canada doit déjà débourser de l’argent pour une action collective de ce côté-ci de la frontière, et d’autres camps ont été mis en vente au Canada.

Les citoyens concernés, d’anciens campeurs, des organismes de conservation et des parents voulant redonner l’accès à la nature aux enfants se mobilisent depuis des années pour défendre la conservation de la réserve scoute Tamaracouta.

La possibilité de sauver un tel joyau devrait intéresser au premier chef les élus, tant à Québec qu’à Ottawa, ainsi que les fondations qui cherchent des moyens de protéger notre patrimoine écologique tout en permettant un accès au public pour des générations à venir.


Une version précédente de ce texte, qui expliquait que Boy Scouts of America et Boy Scouts of Canada ont été visés par des actions collectives, a été modifiée. Ces deux associations se nomment aujourd’hui Scouting America et Scouts Canada, respectivement.

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