Il faut des solutions «pragmatiques» pour le climat, estime le p.-d.g. d’Énergir

Pour stimuler l’action, Éric Lachance propose de miser sur des solutions «pragmatiques», qui ont un bénéfice économique d’abord, et collatéral pour le climat.
Photo: Ryan Remiorz La Presse canadienne Pour stimuler l’action, Éric Lachance propose de miser sur des solutions «pragmatiques», qui ont un bénéfice économique d’abord, et collatéral pour le climat.

Le grand distributeur gazier du Québec, Énergir, doit être « créatif » pour poursuivre l’exécution de son plan de décarbonation en 2025, dans une Amérique du Nord de moins en moins soucieuse des changements climatiques. « C’est important d’avoir un portefeuille de solutions pragmatiques », a expliqué le p.-d.g. de l’entreprise, Éric Lachance, durant une causerie organisée par le Cercle canadien, à Montréal, lundi midi.

L’entreprise négocie un grand virage depuis quelques années. Elle veut vendre moins de gaz, mais à plus fort prix. En offrant du gaz naturel renouvelable (GNR) plutôt que du gaz fossile, Énergir espère réduire d’autant plus son empreinte carbone. Cependant, il y a loin de la coupe aux lèvres : en 2024, la société gazière ne distribuait que 2 % de GNR.

À partir de cette année, un règlement du gouvernement du Québec exige qu’Énergir mélange au moins 5 % de GNR dans son réseau. M. Lachance a bon espoir d’y arriver et se dit « confiant », même si un fournisseur aux ambitions majeures, Nature Energy (propriété de Shell), a abandonné le Québec l’automne dernier. « Les contrats [avec différents fournisseurs] sont déjà tous en place. On a de la marge de manœuvre », répond-il au Devoir.

En outre, l’homme d’affaires affirme que les approvisionnements d’Énergir — fossiles ou renouvelables — ne sont pas directement menacés par la guerre tarifaire qui se dessine entre Ottawa et Washington. À moyen terme, il s’inquiète cependant pour ses clients industriels, dont certains pourraient ressentir les contrecoups des droits de douane, ce qui ralentirait leur passage au GNR.

« On voit toute la palette de couleurs », explique-t-il. Certains clients industriels veulent poursuivre leur décarbonation, car ils ont des acheteurs partout dans le monde, et ceux-ci sont sensibles aux enjeux climatiques. D’autres sont paralysés par les « incertitudes » imputables au président américain, et ils suspendent leur transition énergétique dans l’immédiat.

Délaisser le gaz fossile n’est pas une décision anodine : « Le gaz naturel fossile, c’est l’énergie la moins chère, rappelle M. Lachance. Passer à l’électricité ou au gaz renouvelable, c’est 6, 7, 8 fois plus cher. » La crise tarifaire pourrait toutefois créer des « opportunités », si, par exemple, des entreprises québécoises décidaient de vendre leurs produits en Europe, où ils peuvent valoriser une faible intensité carbone.

Devant un parterre bondé de gens d’affaires, M. Lachance s’est désolé de voir une dégringolade de la priorité accordée aux changements climatiques au sein de la population du Québec, citant la dernière édition du Baromètre de l’action climatique. Il a attribué ce désengagement à la « situation économique » des ménages, qui se détériore.

Pour stimuler l’action — même si la « distance » entre la population et les enjeux climatiques s’accroît —, M. Lachance propose de miser sur des solutions « pragmatiques », qui ont un bénéfice économique d’abord, et collatéral pour le climat. Par exemple, dit-il, rehausser l’efficacité énergétique d’un bâtiment ou d’un procédé peut générer un retour sur investissement très rapide, tout en réduisant les gaz à effet de serre par la bande.

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