J’en appelle à la qualité en éducation

«J’en appelle à de la qualité dans toutes les classes du Québec», écrit l’autrice.
Photo: Jeff Pachoud Agence France-Presse «J’en appelle à de la qualité dans toutes les classes du Québec», écrit l’autrice.

Notre école va mal. Nos gouvernements manquent de reconnaissance envers le travail du corps enseignant, dont on sait les conditions de travail déplorables ; les syndicats des enseignants se soucient à juste titre des droits de leurs membres, mais militent contre un ordre professionnel et négocient pour le moins de formation continue possible. Certains enseignants refusent… d’apprendre ! Ils pensent en connaître assez pour « faire la job ». C’est une aberration insupportable que d’enseigner et de mépriser l’apprentissage. Ceux qui se destinent à l’enseignement ne reçoivent pas toujours une formation de qualité, que ce soit à cause d’un gouvernement qui veut revoir à la baisse les exigences de la formation ou à cause de certains professeurs et chargés de cours qui s’improvisent spécialistes en tout…

Eh bien, non. Tout ne s’enseigne pas par n’importe qui ni n’importe comment.

En ces temps de grande noirceur qui menace nos démocraties chèrement acquises par nos aïeuls, et sagement préservées par nos mères et nos pères, l’éducation n’a jamais été aussi importante. Et, tout professionnel que nous sommes, nous ne pouvons rester les bras croisés à nous plaindre de nos conditions de travail. Certes, elles sont exécrables. Ce n’est pas une raison de baisser les bras.

J’en appelle à la qualité. J’appelle à prendre la mesure de ce qui nous appartient dans le succès ou l’échec de nos élèves et de nos étudiants. J’appelle à développer de l’estime pour nos élèves et nos étudiants, ce qui veut dire faire appel à leur intelligence, à leur capacité de penser, de réfléchir, de rechercher, de manipuler, d’essayer, de se tromper, et de recommencer pour comprendre pourquoi. Il y va de leur avenir, car ils devront être bien équipés pour faire face au monde de demain.

Tous les élèves, sans exception, sont capables d’apprendre, à la condition que « nous » les placions dans les conditions qui le leur permettent. Considérons leurs difficultés comme étant d’abord nos défis !

J’en appelle à la qualité. J’appelle à faire preuve de jugement critique d’abord envers nous-mêmes et notre profession, à sortir de nos chambres d’écho pour cesser de tourner en rond. Mettons-nous nous-mêmes sur le mode de l’apprentissage : travailler en équipe avec des collègues meilleurs que soi ; organiser des cercles de discussion avec des pairs ; s’essayer à une nouvelle pratique par année ; faire appel aux conseillères pédagogiques et être exigeants envers elles ; s’intéresser aux pays dont le système éducatif est performant et chercher à comprendre pourquoi ; lire sur l’éducation en commençant par les programmes que l’on enseigne !

Je suis toujours secouée d’entendre un enseignant dire ne l’avoir jamais lu et le pourfendre pourtant…

Pourquoi acceptons-nous encore de soumettre nos élèves à des bourrages de crâne qui ne servent qu’à les préparer à des examens alors que d’autres pratiques d’évaluation existent et ont fait leurs preuves ? Comment en vient-on à croire en des recettes miracles censées fonctionner pour tous les élèves alors que chacun d’eux est unique et que l’apprentissage est si complexe ? Sommes-nous en train de faire de l’école une chaîne de montage qui produit des citoyens dépourvus, pourvu qu’ils soient rentables ? Peut-être en sommes-nous rendus à ne pas savoir comment faire autrement ? L’heure serait grave…

J’en appelle à la qualité en éducation. J’appelle à viser l’excellence dans nos gestes quotidiens. J’appelle à faire « œuvre utile » de notre travail, à prendre les moyens qui sont à notre portée pour devenir tous les jours plus compétents et le rester.

Choisir l’enseignement vient avec des responsabilités individuelles et collectives. Ne pas les assumer, c’est trahir un serment que nous ne sommes pas toujours conscients d’avoir fait… mais les mirages de « ceux qui ordonnent » ne sont débusqués que grâce à des têtes bien faites. Pour que l’éducation permette à nos enfants et à nous-mêmes de savoir faire face aux défis qui nous attendent, j’en appelle à de la qualité dans toutes les classes du Québec.

Pour comprendre qui nous étions et qui nous sommes, pour choisir ce que nous deviendrons, pour donner le meilleur à tous nos enfants.

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