Pour que les Haïtiennes aient le droit de choisir

Martine Letarte
Collaboration spéciale
Le Projet amélioration de la participation citoyenne a commencé en avril 2021 dans les communes haïtiennes de Léogâne et de Gressier.
Photo: Regroupement des organisations de femmes de Gressier et de Léogâne Le Projet amélioration de la participation citoyenne a commencé en avril 2021 dans les communes haïtiennes de Léogâne et de Gressier.

Ce texte fait partie du cahier spécial Coopération internationale

L’association Mission inclusion travaille à mobiliser la communauté haïtienne et à renforcer les institutions de santé pour permettre aux femmes de prendre le contrôle de leur vie.

Alors que les gangs armés contrôlent 85 % de la capitale d’Haïti, Port-au-Prince, d’après les estimations de l’Organisation des Nations unies (ONU), Mission inclusion travaille à améliorer la santé sexuelle et reproductive des femmes et des adolescentes, à une quarantaine de kilomètres de là.

« On a tendance à penser que l’homme a le droit d’avoir des relations sexuelles avec sa conjointe sans avoir de consentement de sa part, seulement parce que c’est sa conjointe », témoigne Santia Chancy, coordonnatrice terrain du Projet amélioration de la participation citoyenne (PACIT) et représentante de Mission inclusion en Haïti. À ses yeux, le consentement n’est pas bien défini en général pour les gens en Haïti. « Nous avons fait beaucoup de travail, ajoute-t-elle, mais il en reste encore beaucoup à faire. La femme a le droit de faire ce qu’elle veut de son corps. Et quand c’est non, c’est non. »

La contraception est aussi un défi. « Ce n’est pas très bien vu, surtout si c’est pour une femme qui n’est pas en couple, explique Mme Chancy. […] Le moyen de contraception le plus utilisé est le condom, mais il est utilisé par l’homme, c’est lui qui a le pouvoir. Il faut encore expliquer aux femmes qu’elles ont aussi le droit de faire leur choix. »

Travailler en communauté

Le PACIT, financé par le gouvernement du Canada, a commencé en avril 2021 dans les communes haïtiennes de Léogâne et de Gressier.

« Depuis mars 2024, la situation humanitaire s’est brutalement détériorée avec l’intensification des attaques des gangs, surtout dans la région métropolitaine, indique Santia Chancy, jointe à Léogâne. Nous avons dû laisser Gressier lorsque les gangs en ont pris le contrôle en mai dernier. À Léogâne, comme notre personnel est local et que nous avons un très fort ancrage dans la communauté, nous avons un sentiment de sécurité qui nous permet de continuer à travailler. »

Mission inclusion a collaboré avec des organisations de femmes, des clubs de parents et des clubs de jeunes pour améliorer la capacité de mobilisation de la communauté à faire valoir ses droits.

« Mais pour faire valoir ses droits, il faut bien les connaître, précise la coordonnatrice. Dans une approche féministe, en utilisant des outils de participation citoyenne, nous avons amené les gens à cibler des enjeux et à trouver des solutions. » Elle donne l’exemple des grossesses précoces. « Plusieurs causes ont été nommées, notamment le manque d’éducation des parents, illustre-t-elle. Ensuite, les gens ont proposé d’organiser des rencontres avec les parents. »

Toujours, il faut aller chercher des alliés. Elle mentionne notamment le maire de Léogâne et, plus largement, les hommes. « Nous avons besoin des hommes pour avancer dans ce dossier, précise l’Haïtienne. Nous allons les chercher en leur parlant de leur femme, de leur fille. L’idée, c’est de créer un espace de dialogue entre ces gens qui n’ont pas nécessairement l’habitude de s’assoir ensemble et de chercher des solutions afin que nous puissions vivre dans une communauté sans violence. Nous ne disons pas aux gens quoi faire, nous mettons à profit leur potentiel pour trouver des solutions. »

Cette approche basée sur l’autonomisation vise à développer l’engagement citoyen. « Les gens sont mieux informés et, ensuite, ils veulent changer les choses, explique Santia Chancy. Nous prenons aussi le temps de célébrer les réussites. C’est très important pour stimuler le sentiment d’autosatisfaction, et cela donne de l’énergie pour la prochaine étape. »

Appuyer les institutions de santé

PACIT a aussi réalisé un travail de renforcement des institutions de santé, notamment auprès de l’Unité d’Arrondissement de Santé (UAS) Anacaona, qui coordonne les activités de santé à Léogâne et à Gressier. « Beaucoup de formations ont été données, entre autres en reddition de comptes, indique Mme Chancy. On a fourni des outils et, avec une approche de codéveloppement, nous discutions avec les gens en poste afin de comprendre, par exemple, pourquoi certains [outils] n’étaient pas utilisés. »

Le PACIT a également soutenu financièrement l’UAS afin, notamment, que des visites de supervision puissent être organisées. « La disponibilité et la qualité des services de santé sexuelle et reproductive ont été augmentées, mentionne la coordonnatrice. Les femmes et les adolescentes en bénéficient. »

Ce contenu a été produit par l’équipe des publications spéciales du Devoir, relevant du marketing. La rédaction du Devoir n’y a pas pris part.

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