Le grand retour des classiques de la cuisine française
Collaboration spéciale

Ce texte fait partie du cahier spécial Plaisirs
Oeufs durs mayonnaise, soupe de poisson, sole meunière, quenelles, blanquette de veau ; ces plats typiques de la tradition culinaire française, populaires jusque dans les années 1990, s’étaient raréfiés sur les cartes des restaurants, à l’exception de quelques institutions. Mais on assiste actuellement à un retour de ces classiques de brasserie réconfortants à souhait.
Il fut un temps où les classiques de la cuisine française, codifiée par le chef Escoffier, représentaient le summum du raffinement au Québec. À compter de la fin du XIXe siècle, on s’habillait chic pour se délecter de ris de veau sauce Périgueux, d’asperges à la sauce mousseline et de foie gras dans les restaurants de grands hôtels de luxe à Québec et à Montréal. La gastronomie française a encore longtemps tenu le haut du pavé, puisque, dans les années 1970, on se pressait, à Montréal, chez Bardet, au St-Amable, à L’Amphitryon, Chez Delmo et au Vert galant pour se régaler de quenelles, de turbot sauce hollandaise ou de cuisses de grenouille au vin blanc.
La multiplication des restaurants ethniques, l’émergence d’une cuisine du terroir québécois et les tendances culinaires de passage ont, par la suite, eu raison de nombreuses brasseries, dont le menu classique français était devenu désuet. À Québec, difficile de trouver de nos jours un restaurant de ce type qui ne propose pas de burgers ni de poutines. Tandis qu’à Montréal, seules quelques institutions (Chez Lévêque, L’Express, Leméac) ont réussi à traverser le temps sans perdre leur âme.
Toutefois, signe que les modes sont cycliques, et qu’un classique demeure un classique, cette cuisine typiquement française a commencé à effectuer son grand retour.
Des valeurs sûres synonymes de plaisir
Richard Bastien, à la tête du Mitoyen (Laval) depuis 47 ans, a légué à son fils Jérémy bien plus que l’amour de la cuisine. Les deux chefs copropriétaires du Monarque (Montréal), ouvert en 2018 et sacré Restaurant de l’année aux Lauriers de la gastronomie québécoise en 2023, aiment les classiques français, dont ils s’inspirent au quotidien dans leurs menus.
« J’apprécie le côté tradition qui s’y rattache. Cela a quelque chose de rassurant et d’intemporel, qui plaît à toutes les générations », indique Jérémy Bastien. Le volet brasserie du Monarque propose donc plusieurs classiques à sa carte : gougères au fromage, parfait de foie gras, potage taillé, confit de canard, bouillabaisse. Ou, encore, ce clin d’oeil direct à la Bourgogne (où le chef a, plus jeune, fait un stage) avec un os à moelle taillé dans la longueur, servi avec des escargots de Bourgogne, une sauce au vin rouge et une persillade.

Dans la salle à manger du restaurant, où le menu change régulièrement, on peut aussi, de temps à autre, trouver du pot-au-feu, du gigot d’agneau et du vol-au-vent à la financière. Quant au Mitoyen, les ris de veau, le foie gras poêlé et la blanquette de veau y sont très demandés.
« Je crois que les gens aiment le réconfort que ces plats leur apportent. Ce sont des valeurs sûres synonymes de plaisir et de constance. Mais encore faut-il les cuisiner de la bonne manière, avec des fonds maison et des ingrédients de choix, de manière authentique », explique Richard Bastien. « Il faut aussi que les plats offerts au menu aient leur raison d’être, renchérit son fils. Je ne veux pas proposer de la tarte Tatin quand les pommes ne sont plus bonnes, même s’il s’agit d’un de nos desserts les plus vendeurs. »
Un premier bouillon au Québec
Le concept de bouillon a été inventé au milieu du XIXe siècle par un boucher, Pierre-Louis Duval, qui utilisait ses restes de carcasse et ses bas morceaux de viande pour réaliser un bouillon revigorant, enrichi de vermicelles, qu’il vendait à prix modique aux travailleurs des Halles, à Paris. Très rapidement, ces petits établissements se sont multipliés, au même titre que les plats simples et accessibles qu’ils proposaient.

Après avoir presque disparu de la carte, les bouillons sont redevenus populaires depuis quelques années en France. « Mais ce concept n’existait pas encore au Québec. Il y avait donc un créneau à prendre », raconte Arthur Dorville, directeur général du nouveau Bouillon Albert, qui a remplacé le Hachoir au coin des rues Rachel et Saint-Denis, à Montréal.
Sur place, on joue à fond la carte des classiques français. Oeufs mayonnaise à la russe, rillettes et cornichons, escargots persillés dans leur coquille, ravioles du Dauphiné (servies en plaque), bouchée à la reine, boudin purée, onglet de boeuf à la sauce café de Paris, millefeuille à la verveine ; l’heure est à la simplicité, à la nostalgie… et ça fonctionne ! Le restaurant fait le plein depuis son ouverture, le 7 octobre dernier.

« Nous touchons une large clientèle, confirme M. Dorville. Les personnes d’origine française se retrouvent dans cette cuisine, qui leur rappelle celle de leurs grands-mères. Et toutes les autres découvrent ou redécouvrent des classiques à prix doux, avec une belle carte de vins en prime, dans une ambiance chaleureuse. » Pour avoir succombé au riz au lait et à la nougatine de pacanes de ce premier bouillon québécois, nous espérons que tous ces classiques nous réconforteront encore longtemps.
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