«Le Devoir», une histoire professionnelle, familiale et de cœur

Judith Laurier lit «Le Devoir» assidûment et collabore  régulièrement avec ses journalistes en tant que directrice des communications à la Fédération des cégeps.
Photo: Marie-France Coallier Le Devoir Judith Laurier lit «Le Devoir» assidûment et collabore régulièrement avec ses journalistes en tant que directrice des communications à la Fédération des cégeps.

Enfant, Judith Laurier se retrouvait parfois à accompagner sa mère, Marie Laurier, journaliste au Devoir, dans des conférences de presse. Elle se souvient que sa mère travaillait de longues heures le soir, et souvent le week-end. Aujourd’hui, c’est elle, en tant que directrice des communications à la Fédération des cégeps, qui organise les conférences de presse.

Lorsqu’elle s’est mariée, Judith Laurier est aussi devenue la belle-fille de Solange Chalvin, une autre ancienne journaliste du Devoir. « Le Devoir, pour moi, c’est une histoire professionnelle, c’est une histoire familiale, mais c’est aussi histoire de cœur », raconte-t-elle. Car Solange et Michel Chalvin, devenus les grands-parents de ses enfants, se sont rencontrés à travers Le Devoir. Michel Chalvin, un Français d’origine qui a servi dans la marine en Indochine, écrivait des lettres au Devoir pour réagir aux articles de Jacques Hébert qui portaient notamment sur ce conflit. « Je pense qu’il contestait un peu ce qui était écrit sur la guerre en Indochine à ce moment-là », dit Judith Laurier. Solange Chalvin, née Barbeau, qui était la secrétaire du rédacteur en chef André Laurendeau et du directeur du Devoir Gérard Filion, a donc entrepris une correspondance de plus en plus empressée avec Chalvin, qui viendra finalement la rencontrer à Montréal et l’épousera.

Ces femmes étaient des pionnières dans le monde du journalisme québécois. Mais Judith Laurier se souvient que sa mère prenait naturellement sa place dans ce milieu, sans avoir à combattre démesurément pour s’affirmer comme femme.

Après être devenue journaliste au Devoir, Solange Chalvin publiera avec son mari le livre Comment on abrutit nos enfants. La bêtise en 23 manuels scolaires, qui dénonçait la pauvreté des manuels scolaires québécois.

À l’âge de 14 ans, Judith Laurier avait entrepris de réaliser un scrapbook avec les articles de sa mère. C’était bien sûr avant l’Internet et l’archivage instantané de l’information. Sur les archives jaunies du Devoir des années 1980, on lit des enjeux qui font écho à ceux d’aujourd’hui, ceux traitant de la congestion dans les urgences d’hôpitaux, par exemple, ou de l’accès aux services sociaux.

Photo: Marie-France Coallier Le Devoir Un article de Marie Laurier traitant de la congestion dans les urgences

Inquiétudes récurrentes

Sa mère, Marie, s’inquiétait de façon récurrente de la survie de l’entreprise, se souvient-elle. « Ma mère était inquiète de voir Le Devoir disparaître », raconte-t-elle. Soutien financier de la famille, Marie Laurier avait vécu une grève dès son arrivée au Devoir sous Claude Ryan.

« Ma mère a beaucoup travaillé pour que Le Devoir survive. Elle y a cru beaucoup, ça, c’est sûr. Je pense qu’elle serait ravie de voir que c’est sauvé, là. »

À l’époque où Le Devoir était logé dans l’édifice de la rue Saint-Sacrement, infesté de souris, Marie Laurier avait offert à Claude Ryan d’y faire vivre un chat, qui en aurait eu raison. « Connaissant ma mère, elle aurait été capable de le faire », dit Judith Laurier. Pour Claude Ryan, il n’en était pas question… En 1992, Le Devoir déménageait rue De Bleury. Atteinte du cancer, Marie Laurier aura travaillé au Devoir jusqu’à son dernier souffle. « Elle allait travailler au Devoir après ses traitements de chimiothérapie », se souvient Judith Laurier.

Marie Laurier est décédée en 1995. Et Solange Chalvin, la grand-mère de ses enfants, nous a quittés en octobre dernier.

Mais Judith Laurier lit encore Le Devoir tous les jours, d’abord en ligne, le matin, avant de le finir, le soir, sur papier. Comme représentante de la Fédération des cégeps, elle collabore régulièrement avec ses journalistes.

Et Le Devoir, qui a tant animé les discussions de famille, est encore bien présent dans la vie des Laurier. Tous les week-ends, soit en personne, soit en ligne, elle se mesure au Défi de l’info du Devoir avec son mari actuel et sa sœur Geneviève, une fidèle abonnée qui vit à Toronto depuis 35 ans.

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