Une infirmière congédiée après avoir soutenu des étudiants africains en Abitibi

Après une vague d’échecs survenus au printemps au cégep de l’Abitibi-Témiscamingue, des étudiants exclus du programme visant à recruter 1000 infirmiers et infirmières à l’étranger s’étaient d’abord confiés de manière anonyme à Roselyne Koa Ndzana, une infirmière clinicienne assistante cheffe au Centre intégré de santé et de services sociaux de l’Abitibi-Témiscamingue (CISSS-AT). En juin dernier, cette infirmière d’origine camerounaise, qui ne fait pas partie du programme, a publié sur son profil Facebook trois vidéos où elle relate les situations humiliantes et les traumatismes vécus par les étudiants. Peu de temps après, elle a été congédiée.
« J’ai été licenciée parce que j’ai dénoncé publiquement la violence psychologique dont [les infirmiers et infirmières diplômés hors Canada] étaient victimes, lors de leur formation et la situation de précarité dans laquelle ils étaient plongés après leurs évictions [du programme] », soutient-elle.
Mme Koa Ndzana allègue que certains étudiants du programme se sont fait discriminer sur la base de leur origine. « [Il y a des personnes] qui déterminent avant même les évaluations qui va réussir et qui ne va pas réussir. Et ça se joue au faciès. C’est dit. Il y a des témoins », rapporte la lanceuse d’alerte dans une de ses vidéos.
Cette infirmière d’expérience qui a exercé en France a fait également entendre dans ses vidéos sur Facebook des témoignages anonymes d’étudiants reçus sur sa boîte vocale contenant des accusations de discrimination et d’incivilités. Elle dit notamment que plusieurs d’entre eux se sont fait reprocher leur odeur corporelle. « [Il y a] cette enseignante qui estime que les Noirs sentent, qui estime qu’il faut apporter le déodorant. »
En août dernier, conjointement avec le Centre de recherche-action sur les relations raciales (CRARR), elle a demandé une enquête indépendante, étant donné les traitements arbitraires et discriminatoires vécus par ces infirmiers et infirmières africains. « J’aimerais que l’État prenne ses responsabilités », a dit Mme Koa Ndzana au Devoir. « Le gouvernement fait passer ce projet pour une réussite, mais c’est une véritable tragédie humaine qui se joue. »
Remerciée alors qu’elle était en congé parental, Mme Koa Ndzana a déposé plusieurs plaintes par l’entremise de son syndicat, pour harcèlement et congédiement illégal. Elle demande aujourd’hui que justice soit faite. Le syndicat et le CISSS-AT n’ont pas souhaité commenter le processus en cours pour des raisons de confidentialité.