Découvrir Jean-Marc Vallée par la musique

L’un des plus grands et regrettés réalisateurs québécois, Jean-Marc Vallée, a droit dès jeudi, au Centre Phi, à une rétrospective de son œuvre et de ses legs. L’exposition gratuite Mixtape met particulièrement l’accent sur l’importance de la musique dans son processus créatif et dans son quotidien.
« Deux ou trois ans avant sa mort, on était dans des funérailles, mon père, mon frère et moi. Mon père avait dit qu’il espérait qu’à sa mort, on ne ferait pas des funérailles traditionnelles. Il disait qu’il fallait de la musique, que ce soit un party, qu’on célèbre la vie », raconte Alex Vallée, un fils de Jean-Marc Vallée, producteur associé de l’exposition. « Quand il est malheureusement parti, on s’est demandé comment réinventer la roue. Le Centre Phi m’est venu en tête, je voulais au départ faire une exposition lors de ses funérailles. »
En 2022, une cérémonie a eu lieu au Centre Phi en l’honneur du réalisateur, mais l’exposition comme telle a pris davantage de temps à se matérialiser. « Ça valait la peine d’attendre, de travailler autant », estime maintenant M. Vallée.
En revisitant la carrière du réalisateur de C.R.A.Z.Y., de Café de Flore et de Dallas Buyers Club, le thème de la musique s’est vite imposé, souligne le coconcepteur Sylvain Dumais. « Son utilisation de la musique et l’intention qu’il y mettait au niveau narratif et émotif, c’était le plus gros élément qui le différenciait des autres réalisateurs et réalisatrices », dit-il.

« Je suis content qu’on découvre Jean-Marc sous son angle préféré », a quant à lui jugé le fils du cinéaste.
Le terme « mixtape » fait référence aux compilations musicales que Jean-Marc Vallée aimait distribuer à ses proches. Dans la première salle de l’exposition, un enregistrement de la voix d’Alex Vallée confie d’ailleurs que le réalisateur a offert à son fils son premier mixtape, intitulé « musique pour bébé », peu de temps après sa naissance.
Au fond de la salle est érigée une maquette de la maison d’enfance de l’artiste, où les vinyles et le tourne-disque avaient une place de choix. Des extraits très musicaux de ses films et de ses séries, dont Wild, Demolition et Big Little Lies, sont ensuite projetés sur les murs.

Ses premières œuvres
La deuxième installation permet de visionner en intégralité les premiers courts métrages de l’artiste, Les fleurs magiques et Les mots magiques, qui ne sont plus accessibles ailleurs. On y voit déjà les couleurs et les thèmes chers au réalisateur, dont les conflits familiaux.
Dans la prochaine installation, les Mixtapes, les visiteurs revêtent des écouteurs et manient des boutons pour naviguer dans une sélection de bandes sonores, soit des chansons marquantes pour Jean-Marc Vallée et des dizaines de témoignages de ses amis et de ses collaborateurs. Parmi eux, on compte Marc-André Grondin, Alexandra Stréliski, Évelyne Brochu, Reese Witherspoon, Denis Villeneuve, Vanessa Paradis et Matthew McConaughey.

« Tout le monde a voulu nous parler. Ce sont 100 % des entrevues originales », souligne M. Dumais.
Le public a ainsi accès à des anecdotes savoureuses, souvent touchantes. On apprend notamment que Vallée faisait souvent écouter de la musique aux acteurs au début d’une journée de tournage, pour les plonger dans l’émotion souhaitée, et que Stairway to Heaven, de Led Zeppelin, a inspiré le scénario de Café de Flore.
L’âme d’un rockeur
Jean-Marc Vallée se considérait comme une rock star ratée. « Le rock m’a donné des ailes, c’était ma religion, peut-on l’entendre dire dans un extrait d’entrevue. Ça me faisait rêver, je voulais faire quelque chose de ma vie et sortir de ce que je vivais, qui n’était pas à mon goût. »

L’exposition déborde du seul thème de la musique. La quatrième installation, en particulier, s’en détache complètement. Confortablement installé sur des poufs, le public est invité à se laisser porter par les hommages de ceux qui l’ont côtoyé. Manifestement, Jean-Marc Vallée était aimé et admiré par ses collègues, dont plusieurs sont des vedettes hollywoodiennes.
Un cinquième espace clôt l’exposition de manière ludique, notamment avec une vidéo de Jean-Marc Vallée chantant lors d’une soirée karaoké. Elle se conclut également avec une citation de son cru : « La musique est la première source d’inspiration de mes films, de mes rêves, de mes amours, de ma vie, quoi. »
Ce sont des petits bouts de cette vie que le public aura l’impression d’absorber en déambulant au Centre Phi ces jours-ci.