«Ordinary Angels»: coiffure, boisson et rédemption

Dans un bar, Sharon rigole en enchaînant les shooters. À côté d’elle, son amie Rose force un sourire, l’air à la fois las et embarrassé : la seconde sait ce qui s’en vient pour avoir souvent vu la première déraper. En fait, Sharon a perdu contact avec son fils unique, faute d’admettre son alcoolisme. Mais voici qu’au détour d’un article relatant le combat d’un veuf désargenté pour payer les soins de sa fille malade, Sharon entrevoit une possible rédemption. Débarquant dans cette famille éprouvée telle une tornade bien intentionnée, Sharon changera la vie de ces inconnus, ainsi que la sienne. Basé sur une histoire vraie, Ordinary Angels met en vedette une Hilary Swank très en forme.
Heureusement, car ce récit inspirant, mais très romancé, a la main lourde côté mélo (la musique qui vient surligner chaque émotion n’aide pas). Mais c’est justement dans ces moments appuyés que la composition chaleureuse et surtout fort juste d’Hilary Swank maintient le film ancré dans la sincérité.
La double lauréate de l’Oscar de la meilleure actrice, pour Boys Don’t Cry (Les garçons ne pleurent pas) et Million Dollar Baby (La fille à un million de dollars), dévore ce rôle plus grand que nature, sorte d’Erin Brockovich version coiffeuse. Le scénario de Kelly Fremon Craig et Meg Tilly Kelly lui donne d’ailleurs une pléthore de répliques savoureuses à se mettre sous la dent.
À propos des coscénaristes, on doit à Kelly Fremon Craig la récente adaptation Are You There God ? It’s Me, Margaret (Dieu, tu es là ? C’est moi Margaret). Quant à Meg Tilly, surtout connue comme romancière ces années-ci, elle fut longtemps une actrice éminemment appréciée. Sa photo en tenue d’aérobique dans The Big Chill (Le grand frisson), de Lawrence Kasdan, est l’une des plus emblématiques du cinéma américain des années 1980. En 1985, sa composition de jeune novice infanticide dans Agnes of God (Agnès de Dieu), de feu Norman Jewison, lui valut une nomination aux Oscar.
Bref, intéressante feuille de route, rayon scénarisation.
Symbolisme lourdaud
Pour sa part, la réalisation de Jon Gunn est fonctionnelle, mais trop portée sur le symbolisme lourdaud. Pour mémoire, Gunn a réalisé plusieurs films à vocation spirituelle chrétienne financés, comme celui-ci, par la compagnie Kingdom Story Company.
À cet égard, le message religieux est souvent peu subtilement explicité dans le dialogue, l’évangélisation primant alors presque la narration. Là encore, Hilary Swank sauve la mise, à l’instar de son personnage dans le film.