La couverture vaccinale contre les VPH et l’hépatite A diminue chez les élèves québécois

Pour les VPH, tout comme l’hépatite A, la proportion d’écoliers adéquatement protégés en 2023-2024 n’atteignait pas la cible du Programme national de santé publique, qui est de 90 %.
Photo: Paul Vernon Archives Associated Press Pour les VPH, tout comme l’hépatite A, la proportion d’écoliers adéquatement protégés en 2023-2024 n’atteignait pas la cible du Programme national de santé publique, qui est de 90 %.

Depuis 2019-2020, la proportion d’élèves québécois du primaire vaccinés à l’école contre les virus du papillome humain (VPH) et l’hépatite A est en baisse, d’après des chiffres du ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) obtenus par Le Devoir. Un phénomène qui est « préoccupant », selon des médecins, et qui serait dû entre autres à la fatigue vaccinale ayant découlé de la pandémie de COVID-19.

Au Québec, le programme de vaccination gratuite en milieu scolaire prévoit que les élèves de 4e année du primaire reçoivent une dose contre les VPH. Le système immunitaire des enfants entre 9 et 11 ans répond mieux aux vaccins contre ces virus. La dose de rappel en troisième secondaire n’est d’ailleurs désormais plus requise.

De 2019-2020 à 2023-2024, la couverture vaccinale contre les virus du papillome humain a toutefois diminué chez les filles de 4e année, passant de 87 % à 82,9 %. Du côté des garçons, elle a aussi baissé, passant de 86 % à 79,8 % pour cette même période. Les VPH, qui sont principalement transmis par voie sexuelle, peuvent éventuellement causer certains cancers, comme celui du col de l’utérus, du pénis ou de la gorge.

Quant à l’hépatite A, les enfants nés avant le 1er juin 2019 doivent avoir reçu une dose à la fin de la 4e année du primaire pour être considérés comme adéquatement protégés. Ceux venus au monde après cette date se font désormais immuniser à l’âge de 18 mois.

Selon les données du ministère, le taux d’élèves de 4e année du primaire vaccinés contre l’hépatite A a aussi diminué, passant de 90 % en 2019-2020 à 85,6 % en 2023-2024. Cette maladie, qui est causée par un virus qui s’attaque au foie, peut notamment se transmettre au contact d’objets contaminés ou par la consommation d’eau ou d’aliments contaminés.

Pour les VPH, tout comme l’hépatite A, la proportion d’écoliers adéquatement protégés en 2023-2024 n’atteignait pas la cible du Programme national de santé publique, qui est de 90 %.

Des inquiétudes

Ces baisses de couverture vaccinale en milieu scolaire sont inquiétantes, car elles concernent un nombre important d’enfants, affirme le Dr Donald Vinh, infectiologue au Centre universitaire de santé McGill. « Il ne faut pas attendre une grande diminution avant de réagir », estime-t-il.

Le médecin raconte avoir vu récemment des cas de jeunes adultes atteints de cancers liés aux virus du papillome humain. « C’est triste, parce que lorsque ces maladies sont détectées, il est parfois trop tard pour agir. On peut faire de la chimiothérapie ou de la radiothérapie pour tenter de les guérir, mais comme on dit, il vaut mieux prévenir que guérir. »

Dans le cas des VPH, comme l’hépatite A, les vaccins sont d’ailleurs « excessivement efficaces », soulève la Dre Caroline Quach-Thanh, pédiatre-microbiologiste-infectiologue au Centre hospitalier universitaire Sainte-Justine. « Avec une dose, on est habituellement protégés. Ce sont des maladies évitables. »

Hésitation et fatigue vaccinale

La diminution des couvertures vaccinales contre les virus du papillome humain et l’hépatite A serait due à différents facteurs, selon Catherine Lapointe, responsable des relations avec les médias au ministère. « Plusieurs parents disent avoir plus de préoccupations et d’interrogations sur les vaccins depuis la pandémie de COVID-19 », dit-elle.

« Pour la vaccination contre les VPH à l’école, certains parents ont déclaré l’installation d’une fatigue vaccinale qui leur a amené à choisir une pause de la vaccination pour leurs enfants », ajoute Mme Lapointe.

La vaccination contre les virus du papillome humain suscite souvent des questionnements, car elle est parfois considérée à tort comme étant nouvelle, souligne de son côté Ève Dubé, professeure au département d’anthropologie de l’Université Laval. « Elle a toutefois été démontrée sécuritaire, et ça fait plus de 10 ans qu’elle est offerte dans nos programmes scolaires. »

Mme Dubé observe également qu’il circule aussi désormais beaucoup plus de discours contre les vaccins en général sur les réseaux sociaux qu’il y a quatre ans. « Depuis la pandémie, on dirait que les gens se sentent moins complexés par le fait de refuser la vaccination. »

Durant la crise sanitaire, diverses mesures pour encourager « fortement » les Québécois à retrousser leur manche, comme le passeport vaccinal, ont été déployées, note pour sa part la Dre Caroline Quach-Thanh. « Certaines personnes ont pu avoir une impression de perte d’autonomie par rapport à leurs décisions. Et je pense que c’est resté dans l’inconscient collectif. Il va falloir récupérer un peu cette confiance-là de la population à l’égard des institutions. »

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