Des centaines d’artistes réclament une hausse du financement en culture

Sur le coup de 15h, c’est aux sons de la musique d’un DJ que les participants à la Grande Mobilisation des artistes du Québec ont fait entendre leurs doléances.
Photo: Marie-France Coallier Le Devoir Sur le coup de 15h, c’est aux sons de la musique d’un DJ que les participants à la Grande Mobilisation des artistes du Québec ont fait entendre leurs doléances.

Des centaines d’artistes ont bravé le froid mercredi après-midi pour manifester devant les bureaux montréalais du premier ministre François Legault. Ils réclament une hausse importante du budget du Conseil des arts et des lettres du Québec (CALQ).

Sur le coup de 15 h, c’est aux sons de la musique d’un DJ que les participants à la Grande Mobilisation des artistes du Québec (GMAQ) ont fait entendre leurs doléances. La frustration se lisait tant sur les visages que sur les pancartes (« Arts visuels invisibles », « Face au recul de la CAQ, nous créerons plus fort », ou encore « J’accepte les virements »).

« On veut qu’on reconnaisse ce qu’on fait comme étant quelque chose de sérieux, d’essentiel », affirme avec détermination le danseur et chorégraphe Simon Renaud. À ses côtés, l’artiste en danse Marie-Philippe Santerre explique que le manque de financement des arts « se sent au quotidien », elle qui doit jongler avec plusieurs emplois « alimentaires » pour boucler ses fins de mois. « C’est important de se rassembler pour avoir l’impression d’appartenir à une communauté », pour éviter de « souffrir en silence », chacun de son côté, dit-elle.

Quelques pas plus loin, la chorégraphe Rozenn Lecomte renchérit : de tels rassemblements lui donnent la motivation de continuer à pratiquer son art, malgré des conditions précaires. « On aimerait avoir les fonds nécessaires pour continuer à faire rêver le public », ajoute-t-elle.

La comédienne Pénélope Ducharme souligne quant à elle l’importance des arts pour faire rayonner la culture québécoise et la langue française. « Mais une des façons de la faire briller, c’est d’encourager les artistes », notamment financièrement.

Une question de millions

La GMAQ demande que les crédits permanents du Conseil des arts et des lettres du Québec — qui ne dépendent pas de programmes ponctuels — soient financés à hauteur de 200 millions de dollars par année à partir du prochain exercice financier. Cette hausse devrait être attribuée en majeure partie aux programmes de création, selon le groupe. Le budget du CALQ s’élève à 160 millions en 2024-2025 ; il était de 161 millions lors de l’exercice précédent.

Le groupe rappelle que le budget du CALQ ne représente que 0,13 % du budget total du gouvernement du Québec. Par ailleurs, quelque 70 % des demandes reçues dans le cadre des programmes destinés aux artistes ont dû être refusées durant l’exercice 2023-2024 du CALQ, soulignent les organisateurs.

Photo: Marie-France Coallier Le Devoir La GMAQ demande que les crédits permanents du CALQ soient financés à hauteur de 200 millions de dollars par année à partir du prochain exercice financier.

Les deux dernières manifestations du GMAQ ont eu lieu devant les bureaux du ministre de la Culture, Mathieu Lacombe. « On lui fait confiance. Il nous a dit qu’il était de notre bord » et que l’augmentation des crédits budgétaires alloués à la culture était un enjeu pour lui aussi, mais que cela ne relevait plus de lui, affirme Hugo Fréjabise, un des organisateurs de la manifestation. Ce serait plutôt entre les mains du ministre des Finances et du premier ministre. C’est pour cette raison que la manifestation de mercredi a plutôt eu lieu devant les bureaux de M. Legault.

« C’est bien certain que tous les ministres dans tous les ministères voudraient voir leur budget augmenter » de façon importante, répond le ministre Lacombe en entrevue au Devoir. « Malheureusement, ce n’est pas possible sans augmenter les taxes et les impôts de façon importante. »

Il explique avoir rencontré des représentants du milieu des arts dans les dernières semaines et compte faire de même dans les semaines à venir. « Je comprends leurs revendications », soutient le ministre, qui souligne également l’importance de « se demander comment cet argent-là est dépensé ».

Une mobilisation qui ne s’essouffle pas

La porte-parole de Québec solidaire Ruba Ghazal était sur place pour montrer son soutien aux artistes. Ces derniers « font que notre culture existe, que notre identité est si forte qu’elle se transmet partout à travers le monde », a-t-elle déclaré au Devoir. Le gouvernement Legault ne reconnaît pas suffisamment cet apport du travail des artistes, à son avis. Le parti appuie d’ailleurs les demandes financières du regroupement.

La Grande Mobilisation des artistes du Québec a tenu une première manifestation d’envergure en avril dernier pour demander un refinancement majeur du CALQ. Un autre rassemblement avait suivi en mai.

Vivre de son art est un combat de tous les instants, rappelaient plusieurs artistes dans nos pages cette semaine. Les subventions sont difficiles à obtenir et sont loin d’être suffisantes pour assurer un revenu décent. Il est commun pour les artistes de jongler avec plusieurs emplois et de survivre avec des taux horaires frôlant le salaire minimum.

En octobre 2024, les membres de la GMAQ se réunissaient pour planifier les prochaines étapes de la mobilisation. Lors d’un discours tenu à la manifestation de mercredi, les organisateurs ont promis de récidiver chaque mois afin de maintenir la pression sur le gouvernement.

Pendant ce temps, le processus pour nommer le prochain p.-d.g. du CALQ en 2025 suit son cours, précise le cabinet du ministre de la Culture. Le ministre a reçu deux candidatures du conseil d’administration du Conseil, à qui il en a demandé une troisième, pas encore reçue.

Avec Catherine Lalonde

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