«Brigitte Fontaine», Benoît Mouchart

Elle a toujours écrit prodigieusement mieux que ceux qui se coltinaient la tâche de parler de son œuvre. Parfois les mêmes qui préféraient lui « coller un masque de clown » plutôt que de la voir comme une pythie vomissant « l’anormalité de la normalité ». Pour cette monographie, Benoît Mouchart a eu l’esprit d’emprunter la voie de l’histoire orale. On s’y attarde avec minutie, sans jamais basculer dans la logorrhée, aux moments de fulgurance tout comme aux creux dans le parcours de la « reine des Kékés ». Et puisqu’elle est la plus baudelairienne des artistes français (« de tous les temps, de tous les univers »), on traverse les époques en riant ; de celle où les gauchistes sentencieux croyaient que tout le monde était artiste à celle des talk-shows conduits par des demi-intelligents en manque de cotes d’écoute. Dans le noir d’un monde où « des incendies s’allument parce qu’il fait trop froid », Brigitte Fontaine demeure un phare, dont la lumière est celle d’une « délicieuse cigarette ».